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Fabien Nury : « Je ne me limite pas à livrer un scénario. »

Fabien Nury était de passage à Montpellier. Invité de la Carte Blanche BD offerte à Xavier Dorison par la Comédie du Livre, Fabien Nury s’est confié à culturebd. Sorties, projets, BD ou cinéma, ce maître scénariste a la fougue et la passion chevillées au corps.

Votre actualité c’est la reprise chez Glénat de la série L’Or et le sang. Le dernier album sort bientôt ?

Je suis très attaché à ce projet. Le quatrième et dernier tome de L’Or et le sang est prévu à la rentrée chez Glénat qui a racheté 12Bis où ont été publiés les trois premiers volumes. A cette occasion ils seront réédités avec des bonus, de nouvelles couvertures. J’ai beaucoup travaillé sur le sujet.

Abdelkrim, Calixte et Léon font trembler leurs adversaires

Comment vous est venu ce projet de BD sur la guerre du Rif au Maroc au début des années vingt ?
Calixte et Léon engagés auprès des rifains

Calixte et Léon, engagés auprès des rifains

C’est un sujet que mon ami Maurin Defrance et moi avons gardée vingt ans, depuis un voyage au Maroc. Maurin en a tiré un premier manuscrit, qui m’a inspiré une série plus humaine que d’autres, un rêve d’aventures. La guerre du Rif est une guerre juste que perdront les tribus arabes. Les héros sont deux Français, aventuriers de coeur, qui ont connu l’horreur des tranchées de 14. Ils sont devenus amis et s’embarquent dans un trafic d’armes à l’attention des rebelles rifains qui s’opposent aux Espagnols au Maroc. Dans le quatrième album ce sera la dernière charge, dans l’esprit de Lawrence d’Arabie. Une fin de cycle toujours avec Bedouel et Merwan au dessin, ce dernier assurant l’encrage et la finalisation. Une grande exposition devrait avoir lieu à Paris pour la sortie.

Autre projet, un retour vers la Russie après Staline avec Mort au Tsar.

Oui, avec Thierry Robin chez Dargaud. On est en 1905 et c’est l’histoire de l’assassinat du Gouverneur de Moscou, le Grand Duc Serge, oncle de Nicolas II. Il y aura deux albums pour raconter cet événement de chaque côté de la barrière : la version du gouverneur, lié aux excès autocratiques des Romanov (entre autres, la tuerie du 22 janvier 1905 à Saint-Pétersbourg), et celle du terroriste qui cherche à le tuer. Le gouverneur est désigné comme cible, et il ne pourra échapper à son destin. Tout le monde autour de lui fait comme si il était déjà mort…

C’est une répétition de la Révolution de 1917 ?

Plus qu’une répétition, un premier acte. J’adore évoquer une époque en quelques jours. J’ai mélangé fiction, grande histoire, adaptation romanesque. Cela donne une oeuvre curieuse. Le gouverneur refuse son destin, se met en colère, envisage de fuir, puis accepte sa mort. C’est un récit subjectif. Le premier album sortira fin août 2014.

Votre actualité est toujours très fournie.
Tyler Cross prépare son dernier coup...

Tyler Cross prépare son dernier coup...

Mi-octobre, un album d’adaptation de plusieurs nouvelles de Jack London est prévu : Fils du Soleil. Cela se passe dans les Îles Salomon. Eric Henninot est au dessin. Trafic de perles, de coprah, encore l’aventure…

Ensuite, on passe à 2015 et retour au polar : un deuxième Tyler Cross avec Brüno. Le protagoniste est récurrent, mais ce sera un nouveau one-shot : j’aime bien finir et repartir à zéro. Silas Corey est en route, le 3, qui se situera en novembre 1918 juste à la fin de la guerre. Espionnage et finance au programme.

En 2016, un petit tour au Congo après l’indépendance de 1960 à 1962 est prévu, quand il devient le Katanga et que des mercenaires européens surnommés « Les Affreux » partent s’y battre. Un récit de guerre un brin iconoclaste avec Sylvain Vallée.

Quand on voit votre production, toutes vos oeuvres, est-il difficile de passer d’un scénario à l’autre, de jongler avec vos histoires, les genres ?

Je manque de temps en fait. J’y arrive de moins en moins. J’ai besoin d’écrire la totalité d’un scénario. Après il peut bouger bien sûr. Par exemple, j’ai réécrit tout le scénario du tome 3 de Silas Corey pour y intégrer mes pistes dans l’optique du tome 4. Et je ne veux pas « planter » les dessinateurs qui attendent mes textes. Je fais avant tout les histoires que je dois rendre. Je prends de mon temps pour suivre le story-board. J’aime avoir une direction artistique sur l’album objet, sur les slogans de promotion. Je propose des idées.

Silas Corey, le détective dandy va bientôt reprendre du service

Silas Corey, l'ancien reporter devenu espion va bientôt reprendre du service !

En un mot, je ne me limite pas à livrer un scénario. Pour la BD, mon découpage est influencé d’un côté par le cinéma et de l’autre par la littérature, le roman noir. Le but est d’augmenter l’intensité de lecture, radicaliser les points de vue. Cela dit je suis un passionné de film noir, on s’en doute et j’ai du mal à définir la nature du romanesque. Je me suis senti chez moi dans Tyler Cross. On sent aussi que j’ai lu pas mal de polars.

Vous avez travaillé pour le cinéma. Vous continuez ?

Oui. J’ai écrit une douzaine de scénarios pour le cinéma qui ont été payés et qui ne se sont jamais faits. En BD je suis un auteur. En cinéma je suis un scénariste. On prend mon texte, on en jette ou c’est refait de A à Z. Le cinéma c’est comme ça. Mais je continue. J’ai autant écrit pour l’audiovisuel que pour la BD. Mais j’ai fait quarante albums pour un film et un téléfilm. Je suis toujours sur le projet de tournage de Il était une fois en France et je voudrais en être le réalisateur. Mais ce n’est pas simple.

Vos envies ?

Je reste très classique. J’ai les goûts d’un spectateur des années soixante. Je regarde beaucoup moins de séries TV. J’en suis resté aux Soprano. J’ai envie de nouvelles émotions, de découvertes : il me reste tant de classiques à voir et à lire... Je suis un fan des intégrales. On sortira celle d’Il était une fois en France vers novembre prochain. Un beau gros pavé avec un superbe cahier graphique.

Eva et Joseph, unis pour le meilleur et pour le pire...

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