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Bourgois renvoie Caulaincourt au front

Héros invincible de Jean-Baptiste Bourgois, Armand de Caulaincourt vit des aventures aussi épiques que fantastiques malgré ses états d’âme concernant son boss, l'Empereur « monstrueux ».

Favori et confident de Napoléon, général et diplomate, il a tout pour lui Caulaincourt. Mais pourquoi l’avoir choisi ? Jean-Baptiste Bourgois raconte : « Je ne me souviens plus vraiment. J’avais vu au musée de l’Armée un fusil gravé de son surnom, L’Intouchable. C’était un homme très chanceux au combat. Son côté héros tout trouvé m’a plu. » Jeune, son avenir est tracé : l’armée comme papa, puis Napoléon le fait venir à lui, car il apprécie sa franchise. Bourgois n’est pas fasciné par l’Empire : « En parler m’a amené à me demander pourquoi tant de gens sont subjugués par Napoléon. Caulaincourt est un héros parfait, qui le vit très mal et qui se dit que l’Empereur exagère. »

La BD, c’est mon théâtre

Bourgois se lance dans une fresque animée de centaines de petits soldats évoluant dans des décors subtils : « J’ai eu un vrai plaisir à dessiner mes personnages, façon soldats de plomb. » Sempé n’est pas loin. La preuve : « Il y a quelques années, j’ai fait un atelier dans la médiathèque où j’allais quand j’étais jeune. Sur ma fiche d’emprunt, je me suis aperçu que j’avais lu tous les Sempé. C’est un dessinateur qui ne laisse pas voir sa sueur. Son dessin dégage aisance et élégance. Beaucoup de gens font de la BD comme ils feraient du cinéma. Moi j’aime faire de la BD comme si je faisais du théâtre, je suis fasciné par les acteurs au second plan. » Au réalisme de la retraite de Russie, à la part biographique et historique, Bourgois a insufflé une dose de fantastique pour montrer combien Napoléon est prêt à tout pour gagner une bataille : « À la fin, quand les monstres arrivent, Napoléon voit en eux une nouvelle arme possible. Jusqu’où serait-il allé ? Quand il parle du nombre de morts qu’il laisse derrière lui, il l’accepte. C’est un monstre lui-même. » Ce brave Caulaincourt pourra-t-il se décider à trucider son maître ? Bourgois attend le lecteur au tournant, avec un certain Benjamin Rabier et son canard.

Napoléon doit mourir fait partie de ces albums rares : il est sensible et original avec l’envol graphique d’une histoire atypique. Et l’auteur de préciser : « Je me moque de Napoléon sans rien enlever au fait historique. Ma cible, ce sont ceux qui sont, aujourd’hui encore, fascinés par la conquête militaire. »

Article publié dans le Mag ZOO N°78 Nov-Déc 2020

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