Une œuvre qui écorne le mythe US tout en utilisant avec talent certains codes du polar noir dans lequel les Américains excellent. Derrière le vernis de la réussite sociale ou professionnelle, bien des secrets honteux, bien des bassesses.
Miss Octobre est initialement une série en quatre albums, regroupés ici en une intégrale. Il est intéressant de l’aborder ainsi globalement : les trois premiers tomes sont consacrés à une enquête criminelle qui défraye la chronique dans le Los Angeles du début des années 60 : un tueur en série s’en prend à de jolies jeunes femmes, avant de prendre des photos d’elles dans des postures dignes des pages d’un Play-Boy morbide. Le dernier tome est un prolongement permettant d’aller au-delà d’une résolution d’affaire qui aurait pu paraître convenue.
Comme toujours, Stephen Desberg excelle à installer une ambiance à partir de textes off bien écrits, reflétant l’état d’esprit des personnages. On est dans une ambiance à la James Ellroy, faite de duplicité. Le lieutenant Clegg, chargé de l’enquête, doit aussi faire face à ses problèmes de couple et à l’arrivisme du jeune flic Ariel Samson. Au milieu de tout ça, la belle Viktor, riche héritière le jour et cambrioleuse la nuit, souffre d’amnésie partielle suite à une tentative de viol. Elle confie à une détective privée la mission de retrouver son agresseur. Les deux affaires seraient-elles liées ?
Miss Octobre L'intégrale
© Les Humanoïdes associés, 2022
On se perd parfois un peu dans l’intrigue, à la construction un tantinet alambiquée. Certains personnages se ressemblent beaucoup graphiquement, ce qui n’arrange rien. Malgré tout, on ne lâche pas l’affaire, envoûté par le récit décrivant un monde à la fois clinquant et poisseux. Alain Queirex est particulièrement à l’aise avec le design de l’époque, nous offrant de splendides voitures américaines d’époque. Le cadre, qu’il s’agisse de riches demeures, de bars interlopes ou des rues de L.A. la nuit, est toujours soigné, nous immergeant dans la vie des personnages qui se croisent, se détestent ou font l’amour.
Un érotisme discret, teinté de désespoir, flotte sur la série. Une œuvre non exempte de défauts, mais très attachante.