L'Incroyable Histoire du Canard Enchaine

Le très précieux hebdomadaire fête cette année son centenaire. Créé dès 1915 par Maurice Maréchal pour affirmer son pacifisme face au premier conflit mondial, Le Canard enchaîné disparaît après cinq numéros et renaît de ses cendres l’année suivante. Didier Convard, épaulé par le dessin de Pascal Magnat, nous déroule son histoire avec suffisamment d’humour pour assimiler cette cuisine politique française aux relents souvent indigestes.

Subtilement divisé en quatre actes, le scénario de Convard met en scène la comédie du pouvoir assimilée à une scène de théâtre avec ses acteurs improvisés de la scène politique. Les trois premiers, sous forme de bande dessinée, racontent successivement les débuts du Canard enchaîné jusqu’à la fin de la Grande Guerre et ses fréquentes démêlées avec la censure. Puis de l’entre-deux guerres jusqu’à la Libération (sa publication sera suspendue durant l’Occupation) avec ses grandes affaires (Stavisky, Salengro). Le troisième s’attache au règne gaullien de la guerre d’Algérie jusqu’à mai 68 avec sa fameuse rubrique La cour brillamment illustrée par le trait impitoyable de Moisan.

À partir des années 70, l’hebdo, tout en conservant un ton satyrique avec ses fameux calembours et jeux de mots, s’oriente davantage vers le journalisme d’investigation. Face à l’ampleur de la tâche, Convard survole toutes ces années en proposant un parcours sous forme d’un jeu de l’oie avec 176 cases qui mettent en lumière toutes les affaires de corruption qui ont éclaboussé (et qui continuent !) toute la classe politique d’un bord à l’autre.

Parfois inégal dans ses caricatures mais cependant efficace pour servir le propos, Pascal Magnat a sans doute dû travailler dans l’urgence pour que cet album soit bouclé à temps pour célébrer ce centenaire. Un livre édifiant et indispensable à tous ceux qui veulent se faire une idée juste sur tous ces candidats aux prochains scrutins, uniquement préoccupés par notre bien-être, il va de soi !