Quelques pages plus souvent sombres que lumineuses de la vie de Billie Holiday sous le pinceau imprégné d’encre noire de Munoz, sur un scénario volontairement décousu comme une impro de jazz. Plus une introduction qu’une biographie.
A la fin des années 80, un journaliste apprend tardivement un samedi soir qu’il doit pondre un papier sur Billie Holiday pour le lendemain, à l’occasion des 30 ans de sa mort. Ses recherches le temps d’une nuit nous amènent à (re)découvrir des tranches de vie de celle qui fut surnommée Lady Day. Certes, elle ne fut pas épargnée par la vie, avec des rencontres amoureuses plus toxiques qu’autre chose. Elle n’épargna pas non plus son corps, entre drogues de plus en plus dures et alcool, et nous quitta à l’âge de 44 ans.
Carlos Sampayo n’a pas choisi la biographie conventionnelle, mais s’est laissé porter par les paroles de chansons de Billie Holiday et par les impressions qui persistent une fois le disque arrêté, une fois la chanteuse morte. D’entrée il nous montre la violence des hommes (ici personnifiés par Rufus) envers Billie et les poisons qu’elle s’inflige (une injection d’héroïne). L’accent est aussi mis sur la relation artistique et amicale (et non pas amoureuse) privilégiée qu’entretint Billie avec le saxophoniste Lester Young, à la personnalité insaisissable.
Billie Holiday - nouvelle édition
© Casterman, 2022
Le scénariste nous fait suivre en parallèle de manière ponctuelle, outre le travail nocturne du journaliste, les pensées d’un autre homme de l’autre côté de Manhattan, qui croisa Billie enfant et à sa mort. Ce qui complexifie encore la lecture de ce récit non linéaire, surtout pour ceux qui ne connaissent pas par cœur la vie de Billie Holiday. La lecture du dossier documentaire de 8 pages en amont du récit est fortement recommandée pour s’y retrouver au moins un peu.
De son trait caractéristique en noir et blanc, José Munoz nous offre des ambiances nocturnes et jazzy le plus souvent pesantes, le poids du malheur et des errances. L’occasion de montrer une fois de plus son don pour composer des ambiances graphiques où le noir abonde.
Une ballade emplie de fêlures, à l’image de la voix de la chanteuse au soir de sa vie.
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