Superman Chronicles Volume 1 - T1 : 1987

Il est grand, fort et beau, le sourire éclatant, la coupe de cheveux parfaite, il vole, il est super fort, le slip rouge par-dessus son collant bleu, il est le super-héros archétypal par excellence. Son nom ? Superman. Retour en 1987, opération dépoussiérage en bonne et due forme pour le héros kryptonien.

It’s a bird ? It’s a plane ? No it’s Superman

Au cas où vous ne connaîtriez pas les détails, replaçons vite fait le personnage.

Qui est donc Superman ? Le plus célèbre super-héros au monde (avec Batman et quelques autres, je vous l’accorde), créé en 1938 par Joe Shuster et Jerry Siegel, dans les pages d’Action Comics 1. Originaire de Krypton, il ne doit la vie sauve qu’à son père, Jor El qui réussit à l’expédier dans l’espace juste avant que leur planète n'explose. Encore bébé, le jeune Kal El parvient jusqu’à la Terre où il est recueilli par un couple de fermier du Kansas, les Kent. Ces derniers vont alors l’élever comme leur propre fils avec toutes les valeurs morales d’une éducation à l’américaine : le respect, l’entraide et l’abnégation.

Toutefois, au fur et à mesure des années, l’enfant commence à manifester d’étranges pouvoirs. Il vole, il est extrêmement fort, rapide et projette des rayons avec ses yeux. Arrivé à la majorité, il sent que se dessine devant lui un destin plus glorieux au service des plus démunis, il vient s’installer à Metropolis, trouve un emploi de journaliste au Daily Planet et rencontre la femme de sa vie, Lois Lane. Mais surtout, c’est le début des aventures de son alter égo super héroïque, ses premiers adversaires récurrents et ses premiers contacts avec d’autres héros costumés comme lui.

Le petit gars de la campagne est définitivement entré dans la légende.

Superman Chronicles 1987, volume 1 © Urban Comics, 2023

Le grand ménage

En 1985, DC, qui a la volonté de dépoussiérer ses nombreuses licences embourbées depuis quelques années dans un entremêlement d’univers parallèles, lance la maxi-série Crisis on infinite Earths. Le but affiché est de faire table rase du superflu et de ne garder qu’une seule Terre (l’avenir viendra contredire ce plan en ramenant rapidement le concept de Terres alternatives chez l’éditeur, au point ou désormais la situation est pire qu’elle ne l’était avant Crisis… mais passons…), quitte à faire de nombreux sacrifice et à amener dans la foulée ce qu’on appelle des redémarrages. C’est ainsi que Wonder Woman, Flash, Batman, Hawkman, Green Arrow etc reverront leurs origines réécrites de fond en comble avec de nouvelles caractéristiques. Superman n’échappera évidemment pas à ce coup de balai revivifiant.

En parallèle, John Byrne, qui est alors au sommet de sa carrière, avec une production incroyable chez Marvel, décide de changer de crèmerie en allant voir la concurrence. On laisse imaginer ses relations tumultueuses avec Jim Shooter, mais la star évoque depuis quelques temps son envie de faire du Superman. Les plans de restructuration de DC correspondant à cette hypothétique reprise en main, l’occasion est trop belle. Ainsi, après deux exceptionnels numéros de Superman et Action Comics, écrits par Alan Moore lui-même, tous les comics liés à Superman stoppent leur parution pour laisser la place à une première mini-série en 1986, Man of Steel, puis dès janvier 87 au démarrage de trois nouvelles séries.

Superman (Byrne), qui sert un peu de liant à l'ensemble, avec le quotidien du héros, ses combats et ses ennemis, Adventure of Superman (Wolfman/Ordway), plus axée sur Clark Kent, son travail de journaliste, ses relations avec Lois ou Kat Grant et Action Comics (Byrne), qui met en scène Superman et ses interactions avec le reste de l'univers DC, c'est le titre cross-over du lot.

Superman Chronicles 1987, volume 1 © Urban Comics, 2023

On reprend à zéro

Dès le départ, l’idée est certes de tout redéfinir, mais il n’est pas non plus question de proposer des idées radicalement opposées à ce qui avait été fait jusque-là. Ainsi, même si tout le passif du héros est mis aux oubliettes, la refonte y reste assez fidèle dans les grandes lignes. Kal El vient toujours de Krypton, il est devenu Clark Ken, il bosse au Daily Planet etc. Rien n’a fondamentalement différent. Excepté que le ton est résolument plus moderne, plus actuel, comme par exemple Lex Luthor qui a mis sa blouse de scientifique fou au placard pour devenir un richissime industriel qui contrôle Metropolis à grand coups de pots de vin juteux. Ses motivations ont changé aussi. Désormais, le célèbre ennemi du kryptonien jalouse son succès et compte bien lui démontrer, en le tuant si possible, qu’il n’y a qu’un seul grand homme à Metropolis, Luthor lui-même !

Avec Man od Steel, Byrne compte bien redéfinir les bases de cet univers pour la suite des opérations. Démontrant, dans la foulée que loin d’être un héros monolithique, Superman peut aussi être le chantre d’une modernité très ancrée dans son époque, dynamique et fédératrice.

© Superman Chronicles 1987, volume 1 © Urban Comics, 2023

Superman Chronicles 1

Au sommaire de ce premier volume, on a donc les Man of Steel 1 à 6, les Superman 1 à 4, les Action Comics 584 à 587 et les Adventure of Superman 424 à 428.

Quand on commence la lecture, on remarque tout de suite que tout fonctionne incroyablement bien, que ces histoires, de 35 ans d'âge quand même, n’ont pas vieilli d’un iota. D’autant qu’encore à l’époque, l’écriture n'était pas trop plombée par cette volonté de dépeindre un univers dramatique à outrance. Le cœur des intrigues était vif, plein d'action, et la volonté était de constituer un background solide avec des personnages solides, qui ont une histoire.

On remarque aussi qu’il se glisse deçi delà, par le biais de la série Adventure of, des éléments plus actuels, comme lorsque Superman défend Metropolis contre des attaques terroristes, ce qui lui donne ensuite l’idée d'aller régler le problème à la base, au Kurak. Ou encore lorsque Perry White s'attaque à l'Intergang en dénonçant ses exactions et sa violence décomplexée.

Un remodelage bien plus profond et plus impliqué que ce qu’il y avait avant.

De leur côté, les dessins sont toujours de très bonne facture, Byrne menant la barque assez brillamment, épaulé par les encreurs Dick Giordano, Terry Austin et Karl Kesel, tandis que Jerry Ordway assure une magnifique prestation, très classique et pleine de charme.

Urban a déjà proposé le même volume en 2018, sans les textes de cette édition, mais il n’avait pas rencontré de succès. Peut-être n'était-ce pas le bon moment ? Aujourd'hui, les lecteurs sont bien plus curieux vis-à-vis de ce matériau patrimonial, ils réagissent assez positivement au concept de "Chronicles".

On espère donc que la formule fonctionnera, qu’elle permettra la publication de beaucoup d’autres albums, d'autant qu'Urban propose les deux premiers volumes ce mois d'avril et le troisième en août !

Amateurs de « vieux » comics, soyez au rendez-vous.