Joe Hill, fils de Stephen King, est romancier et bédaste. Quand il n’écrit pas des scénarios de bande dessinée, ce sont ses écrits qui se voient adaptés par d’autres artistes du 9e Art. Ici, ce sont David M. Booher et Zoe Thorogood qui donnent des images à un récit volontairement politique autant que geek.
Rain © Hi Comics, 2023
Honeysuckle, jeune femme vivant dans une petite ville du Colorado, est ravie. Sa petite amie vient la rejoindre pour vivre enfin ensemble. Les parents de Yolanda, respectueux des choix de leur fille, constituent une deuxième famille pour Honeysuckle qui n’a jamais bénéficié de tant d’amour. Mais le jour de son arrivée, la pluie tombe. Une pluie de cristaux qui s’abat mortellement sur la ville, tuant tous ceux qui se trouvaient dessous.
Le postapo parle de notre présent
Que ce soit ou non par des zombies, les récits d’apocalypse sont aujourd’hui des miroirs tendus à notre présent. Joe Hill ne s’en cache pas dans la préface de cet album : ses intentions avec Rain, étaient politiques. Il ne supporte plus le climato-sceptisme des trumpistes qui préfèrent laisser la planète brûler plutôt que de remettre en cause le moindre aspect de leur mode de vie.
Mais l’auteur ne veut pas donner de leçon. Il veut donner à vivre des expériences, par l’entremise de la fiction. Alors il utilise la science-fiction et le récit catastrophe pour donner à voir la catastrophe climatique dans laquelle nous nous engageons sans retenue.
Ne parlons pas d'adaptation
N’ayant pas lu l’œuvre initiale de Joe Hill, il est impossible d’évaluer la pertinence du travail d’adaptation de David M. Booher. Concentrons-nous plutôt sur ce qui est directement évaluable, son travail de composition de la BD.
De ce point de vue, il n’y a pas de manquement notable. Le récit est cohérent, les personnages appréciables et les dialogues pertinents.
Le récit est poignant et questionne bel et bien la société américaine sur ses choix, tant environnementaux que sociétaux. Rain est une œuvre engagée, même sur les sujets économiques. Ce n’est pas un récit anticapitaliste, mais rarement une œuvre de comic-book grand public ce sera montrée aussi critique en la matière.
Rain © Hi Comics, 2023
Zoe Thorogood ne perd rien de sa créativité
Elle est la petite perle de la bande dessinée anglosaxonne actuelle. Zoe Thorogood marque les esprits depuis son album Dans les yeux de Billie Scott. Acceptant de travailler en duo, sur une adaptation de roman, l’artiste ne déçoit pas.
Son trait fin répond toujours présent. Elle l’adapte à une mise en image plus classique pour du comic-book indépendant, mais elle conserve toujours son identité. Sa patte se ressent à chaque page. Et on peut toujours compter sur elle pour offrir au lecteur des partis pris narratifs surprenants, comme si elle ressentait le besoin de se surprendre et de surprendre le lecteur par la même occasion.
Rain, publié en France par Hi Comics, confirme sans nul doute l’intérêt de suivre Zoe Thorogood. Mais il constitue aussi une bonne occasion de découvrir la création de Joe Hill grâce au travail d’adaptation de David M. Booher. Autant dire qu’il n’y a donc aucune raison de ne pas se lancer dans cette lecture.