Une idée originale où une famille française se retrouve dans un camp de réfugiés en Suède. Le traitement, trop démonstratif, nuit à la crédibilité des événements. Mais la tension prégnante et le dessin impeccable en font un ouvrage à lire.
Une catastrophe nucléaire à la centrale de Mosseheim, en Alsace, est le point de départ de ce récit. L'événement provoque une situation de guerre civile en France et l'Europe se désagrège. Des centaines de milliers de personnes, françaises et étrangères, sont déplacées dans des camps, notamment en Suède, terre traditionnellement d'accueil pour les réfugiés. Sujet que connaissent les coscénaristes, tous deux installés dans ce pays depuis des années.
L'idée est intéressante : montrer des réfugiés français est l'occasion de mieux se projeter et prendre conscience de la dureté de la vie dans un camp de migrant. Sauf que le scénario a la main lourde sur les ingrédients. Après Fukushima, le Japon ne s'est pas effondré et les Japonais n'ont pas dû fuir en masse leur pays ; on peut s’interroger sur les conséquences décrites ici après Mosseheim. Dans le camp, les Allemands sont des néo-nazis, on n’est pas dans la nuance. Et le gouvernement français ment sur la cause réelle de la catastrophe sans que l'on en comprenne la raison : la version officielle semble plus dangereuse politiquement que la vérité.
Les Exilés de Mosseheim Tome 1
© Dupuis, 2023
Le plus intéressant dans le traitement de l'histoire est en fait la famille de Français au cœur du récit : un couple au bord de l'implosion avec leurs deux enfants, l'aîné étant en pleine crise d'adolescence. Leurs problèmes personnels devraient devenir relatifs avec leur arrivée dans un camp où ils doivent faire la croix sur leur confort d'avant. Mais tout n'est pas si simple. Le choix d'en faire une famille peu sympathique (à part la plus jeune, aux réactions normales à son âge) n’aide pas à trouver un point d’ancrage dans le récit.
Au final, une parabole survoltée qui peut laisser perplexe. Le dessin de Julien Carette, en revanche tient vraiment bien la route. On ressent le stress, le désarroi des personnages. La tension est palpable. Et techniquement, c'est de la belle ouvrage.