Après avoir découvert le cadavre couvert de marques de coups d’un enfant dans la rue, Atari et Tika décident de venir en aide à tous ces laissés pour compte qui vivent reclus dans les bas-fonds de la ville. Mais que se cache-t-il vraiment derrière ces blessures ?
Resituons un peu le cadre de cette série d’anticipation. Nocéan se déroule dans le futur, le niveau de l’eau a soudainement monté, résultat sans appel des débordements industriels et irresponsables de l’humanité. Désormais cantonnée dans des villes à la population très dense, cette même humanité subit de plein fouet un déséquilibre social qui amplifie la lutte des classes. Les conflits se multiplient dans les rues, des groupes d’activistes tentent de dynamiter le fragile équilibre de cette société du paraître et des réseaux sociaux, tandis que les riches restent très riches et les pauvres encore plus pauvres.
Au centre de l’intrigue, on a la jeune Atari, une ado qui garde le souvenir de sa mère assassinée par la police, sous ses yeux, et qui vit désormais avec celle qui l’a recueillie, Iaia. Dans le précédent volume, elle a rencontré Tika, une jeune activiste qui semble nourrir une haine profonde pour l’un des plus grands groupes industriels de la ville, la Ran Corp. Sans domicile fixe, elle fait maintenant partie de la petite tribu Atari/Iaia !
Virtuel et lutte des classes
Après avoir clairement établi la problématique d’une action basée sur la violence et sur l’ignorance des victimes potentielles, Ricard Efa aborde cette fois le thème des réalités virtuelles et la fragilisation de ceux qui s’y engouffrent, sans réfléchir aux effets secondaires, séduits par ces Eldorado virtuels et ces avatars paramétrables à volonté. Dans cette société qui tend à se déshumaniser, les riches ne considèrent les pauvres que comme des objets ou pire comme des enveloppes tout juste bonnes à le servir de gants dans d’interminables combats sans règle.
Bien plus qu’une critique des jeux eux-mêmes, ce second volume pointe du doigt la précarité qui enveloppe ces populations désœuvrées, instrumentalisée par tous ceux qui n’en perçoivent nullement la détresse, ni l’urgence.
Néanmoins, Efa insiste aussi sur l’omniprésence du numérique dans le quotidien de chacun. Tous utilisent une puce qui leur permet de visualiser un écran qui leur donne accès à tout un tas d’applications, tandis que le distantiel est dorénavant la norme pour l’éducation. Ce cadre accentue donc l’impact du virtuel, des réseaux sociaux qui font partie des gestes de tous les jours, et qui peut donc amener les plus jeunes à se laisser séduire par ces RPG colorés et hypnotiques. Le joueur de flûte de Hamelin du futur…
Une série à suivre
Même si l’intrigue reste assez classique, Ricard Efa rythme très bien son récit, avec tout ce qu’il faut comme rebondissements, du fond et des personnages attachants. En parallèle, il creuse un peu plus le passif de Tika, nous révèle vaguement ses liens avec Rand Corp, sans pour autant trop nous en dire. On sent malgré tout, que la suite risque d’être encore plus tendue.
Il faut, tout de même souligner la qualité de cette série qui certes semble vouloir s’adresser à un public ado, mais qui aborde des sujets forts, de façon très pertinente, tout en intégrant des éléments modernes, presque universels aujourd’hui. Il n’est donc pas question, ici, d’aller considérer le lecteur comme un idiot incapable de comprendre des thèmes plus complexes, bien au contraire.
On a hâte de lire la suite, de voir ou Tika nous entraînera, ou la conscience de plus en plus engagée d’Atari la mènera.
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