Erectus

Un virus sème la panique : il transforme toute espèce animale ou végétale en son ancêtre lointain ! L’humanité est-elle vouée à céder la place à l’Homo erectus ? Un passionnant thriller qui offre une réflexion sur la place que l’on est prêt à offrir à l’Autre, quand il est différent.

En Afrique du Sud, un virus s’échappe d’un laboratoire secret et contamine animaux, végétaux et humains. Ses conséquences ? Des mutations spectaculaires : il reprogramme le génome de l’organisme, le ramenant à une espèce antérieure de son évolution. L’éléphant redevient un gomphotherium avec ses quatre défenses et l’homme un Homo erectus, velu et aux arcades sourcilières proéminentes. Un confinement est décrété dans le parc naturel de Kruger, foyer supposé du virus. Mais ce dernier se répand bientôt sur toute la planète. Quel statut l’humanité va-t-elle accorder aux contaminés ? Des centres de rétention sont créés. On suit l’action de la paléontologue Anna Meunier, sommité non conformiste, portée par son amour pour notre lointain ancêtre.

Le récit est tiré du roman Erectus de Xavier Müller publié en 2018 (avant le Covid). Les réactions des uns et des autres, les conséquences de cette pandémie, font évidemment écho en nous aujourd’hui. Deux autres romans écrits depuis par Xavier Müller sur Erectus forment une trilogie.

Erectus © Phileas, 2024

Action, réflexion et émotion

Erik Juszezak, qui signe l’adaptation en bande dessinée, a trouvé le bon rythme grâce à un découpage serré. Son dessin réaliste de facture classique sert bien l’histoire, aux nombreux rebondissements. Il a particulièrement bien réussi à traduire les expressions de cet Homo erectus avec qui la communication semble possible, même si son issue n’est pas immédiate. L’émotion est au rendez-vous. Tant pis s’il dessine cette espèce du genre Homo bien plus grande qu’elle ne l’était réellement. Cette petite tricherie permet de favoriser graphiquement la relation entre Anna Meunier et un Homo erectus qui lui est cher…

Un peu comme pour les X-Men, l’humanité se divise sur le statut du fruit de cette mutation. Doit-on considérer l’Homo erectus comme un frère ou un ennemi ? Au-delà de la différence physique, quels ponts peut-on bâtir ? La peur de la différence anime certains, dont un influent tribun russe. Il est vrai que les mutations créent aussi des animaux particulièrement effrayants et dangereux.

Mais sauver l’espèce humaine peut-il rimer avec renoncer à l’humanité qui est en nous ? Mine de rien, ce thriller addictif amène à se poser un certain nombre de questions plus que pertinentes.

Article publié dans le Mag ZOO N°97 Mars-Avril 2024