Missak Manouchian, Mélinée et les autres. Ils étaient dix, collés sur l’Affiche rouge des Résistants étrangers à abattre, lors de la Seconde Guerre mondiale. Ce nouveau récit de Jean-David Morvan, intense, est dessiné avec réalisme par Thomas Tcherkézian.
Pour ne pas laisser la France tomber entre les griffes des Nazis et collabos, la Résistance bat son plein. Loin des lâches et autres pétainistes, les courageux mouillent le maillot. Missak Manouchian, réchappé du génocide arménien qui a décimé son enfance et son pays natal, donne son nom à l’un des plus célèbres groupes de Résistants. Très vite, il est victime d’une chasse à l’homme : son nom s’écrit en lettres de sang sur l’Affiche rouge, avec neuf autres personnes à abattre. Forcément, puisqu’ils s’opposent au régime de Vichy, à l’Occupant et, de surcroît, sont étrangers : Arméniens, Italiens, Polonais, Hongrois, Roumains… Mais humains, avant tout.
Missak, Mélinée et le groupe Manouchian, les fusillées de l'affiche rouge © Dupuis, 2024
L'affiche rouge sang
Jean-David Morvan livre un nouveau récit, au cordeau, ancré dans le second confl it mondial. Il n’a pas son pareil pour décrire cette période avec une précision historique d’horloger suisse. La présentation des dix noms de l’affiche rouge, leurs actes de résistance et ceux de toutes les femmes et les hommes qui, par leur engagement, leur courage et la ténacité de leurs convictions, nous permettent d’en parler encore aujourd’hui, rythment un récit haletant dont on connaît, malheureusement, la fin tragique.
Thomas Tcherkezian fait le choix, judicieux, d’un dessin tramé. C’est louable, car il apporte une patine ancienne et authentique au récit. Mieux : il retranscrit très bien la violence des événements et le stress des Résistants pour parvenir à leurs fi ns. Immergées dans le dessin, des photos d’archives off rent une crédibilité supplémentaire. Chaque case, chaque page, chaque Résistant qui tombe est un supplément d’âme, un surplus d’humanité offert sur un plateau.
Pour clôturer cette bande dessinée aussi révoltante que ces femmes et ces hommes étaient révoltés, un cahier historique fouillé prolonge la lecture de cette épaisse histoire en 160 pages. La passion de Jean-David Morvan pour la guerre semble inépuisable. Grand bien en fasse à ses lecteurs, sensibles à la période et à sa manière très à lui de la raconter.
Article publié dans le Mag ZOO N°97 Mars-Avril 2024
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