ZOO
couverture de l'album

Série : Un sombre manteauÉditeur : Dupuis

Dessin : Jaime MartinAuteur :

Collection : Aire Libre

Prix : 21.95€

  • ZOO
    note Zoo5.0

    Scénario

    5.0

    Dessin

    5.0
  • Lecteurs
    note lecteurs
    0 critique

Il y avait une femme là-haut, puis deux…

S’écartant passagèrement des récits familiaux, Jaime Martin se tourne cette fois vers la solitude des montagnes, sur les traces de ces femmes appelées les trémentinaires, forcées de survivre seules, loin des préjugés.

Quelque part dans les hauteurs, la vieille Mara tient bon dans sa petite maison. Elle retourne la terre de son maigre jardin et va parfois s’aventurer dans les bois pour cueillir des plantes, des champignons, afin de concocter ses potions qu’elle revend au village, plus bas, dans la vallée. On en raconte des histoires sur elle, sur son petit lopin de terre qui intéresse bien Léo le berger, mais ses remèdes font du bien quand même, ils apaisent, parfois ils guérissent. On méprise l’ancienne, mais on est bien content qu’elle soit là. Surtout la petite Sol qui aimerait devenir comme elle, qui apprend à reconnaître les plantes et leurs vertus, qui est la seule à véritablement la soutenir.

Et un jour, elle découvre, allongée, inanimée, derrière un fourré, une jeune femme à bout de force qu’elle ramène chez elle. Entre la vieille dame et cette inconnue se construit progressivement un lien très fort où l’une et l’autre se complètent, se rassurent, s’aident à lentement se reconstruire.

Serrons-nous les coudes

Le récit se déroule autour de la figure de Mara, une trémentinaire, c’est à dire une femme qui connait les secrets des plantes, qui prépare des potions qu’elle revend ensuite aux villageois, à quelques kilomètres de chez elle. C’est une solitaire qui, abandonnée par son mari, a été amenée, assez tôt, à se débrouiller avec ce qu’elle pouvait cultiver par elle-même ou ce qu’elle trouvait dans la forêt. Mara est assez sauvage, mais elle possède un grand cœur, surtout pour les « rejetés », ceux qui ne sont pas compris, qui vivent en marge. Quand elle trouve cette femme, évanouie, c’est en quelque sorte le reflet de ce qu’elle fut jadis, désœuvrée, sans personne pour l’aider. Elle prend soin de cette oie blessée, la nourrit, lui apprend au fur et à mesure à reprendre pied, tout en devinant une profonde blessure qui la rend méfiante, craintive. Elle entend aussi cette rumeur qui parle d’une femme recherchée par la police, qui aurait tué son enfant, mais Mara sait très bien que la vérité est souvent plus complexe qu’il n’y parait, mais aussi que les gens ont tendance à ne pas creuser plus loin que les chuchotements qui se glissent aux creux de leurs oreilles. Alors ensemble, elles se méfient, font attention, et quand elles doivent descendre au village toutes les deux, l’inconnue devient alors Serena, la nièce de Mara.

Un sombre manteau

Un sombre manteau © Dupuis

Quand tout s’éffondre

On devine assez vite que l’histoire ne pouvait pas continuer aussi simplement. Dès que l’on aperçoit Serena, les jalousies et la méfiance prennent le relais, elle est belle, étrange, elle semble cacher quelque chose… Attention… Les éléments du récit s’enchevêtrent alors, glissant irrémédiablement vers le drame qui frappe un à un les différents protagonistes, à commencer par la petite Sol, mordue par un chien et dont la blessure ne va jamais réellement guérir… Peut-être que pour le coup, Jaime Martin force un peu trop les ressorts dramatiques systématiques, quitte à perdre en finesse et en profondeur de caractérisation. Néanmoins, on ne peut qu’être touché par ce portrait de femmes fortes qui bravent l’adversité face à une époque où le plus gros « danger » restait encore les mœurs elles-mêmes de ces populations engourdies par la médisance et les superstitions d’un autre âge.

Une nouvelle fois, on est extrêmement touché par la justesse de cette écriture et ce regard plein d’émotion sur ces héroïnes face à l’Autre, face à cette société rurale sans nuance.

Un magnifique album, vivement conseillé.

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