Les réserves du galion du capitaine Santoro sont à sec ! Le jeune moussaillon José s’apprête à faire les frais de cette disette… lorsqu’une terre apparaît à l’horizon. Un miracle ? Peut-être pas, car la terre mystérieuse s’avère pleine de dangers. Une terre recouverte de jungle et d’anciennes civilisations. Une terre où règne un étrange singe jaune…
Dans la lignée de l’excellent diptyque La Bête de Zidrou et Frank Pé, les éditions Dupuis revisitent la légende du plus singulier animal de la bande dessinée : le Marsupilami. La délirante création d’André Franquin (qui remonte à 1952) inspire encore et toujours une certaine fascination, au point de pousser Trondheim (Donjon, Les Formidables aventures de Lapinot) et Nesme (Terror-Island, Le Maître des Tapis) à explorer les origines de la créature et plus précisément son ancêtre. Bienvenue au temps des galions et de la fameuse légende de l’Eldorado.
On a rarement vu la Palombie imaginée par Franquin aussi belle ©El Diablo - Dupuis, 2024
Le roi de l’enfer vert
Difficile de résister à l’appel de l’aventure : il faut dire que la couverture annonce une BD savoureuse à parcourir. Le graphisme d’Alexis Nesme est d’une redoutable efficacité visuelle et sa première page happe le lecteur avec brio… et (désolé pour le spoiler) ça va crescendo. On a rarement vu la Palombie imaginée par Franquin aussi belle. Les cadrages, les couleurs, le sens du détail et cette impression de peinture animée… « Houba », que c’est beau ! Comme dans Terror-Island, Alexis Nesme magnifie la jungle de son plus bel écrin. Le Marsupilami en devient presque anecdotique. Et cela se voit dès le premier dessin où il apparaît : l’animal fait partie du décor.
Alexis Nesme magnifie la jungle de son plus bel écrin. Le Marsupilami en devient presque anecdotique. © .El Diablo -Dupuis, 2024
L’ancien nouveau monde
Le scénario de Trondheim met à mal le culte du vieux. Conquistadores comme anciennes civilisations amérindiennes passent au crible du regard moderne… pour de bonnes raisons. Le lien chamanistique reliant le Marsupilami au jeune José apparaît finalement comme un catalyseur de l’imagination que nous évoquent les mystères de l’inconnu. À la manière du film Lost City of Z (de James Gray) ou Avatar (de James Cameron) dont on sent énormément d’influences, El Diablo est une ode à la découverte, l’évasion et l’humilité. On serait presque demandeur d’une suite tant cet album ressemble à un premier épisode.
Article publié dans le Mag ZOO N°101 Novembre-Décembre 2024