Hercule Poirot - T19 : Christmas Pudding

Elle est la reine du roman policier. Agatha Christie est un phénomène et même si on connaît ses plus célèbres titres elle surprend toujours. Ses livres se seraient vendus entre deux et quatre milliards d'exemplaires. Juste derrière ceux de Shakespeare. Paquet a publié 20 de ses titres. Retour sur une œuvre dont la BD a su s’emparer sans la trahir et sur le dernier album, Christmas Pudding, un Poirot savoureux, et pour cause, signé par Isabelle Bottier et Alberto Tarcido.

Couverture de l'album "Hercule Poirot - Christmas Pudding" © Paquet

Poirot est de retour avec une énigme tirée d’une nouvelle, Christmas Pudding proposée à Isabelle Bottier par l’éditeur Pol Beauté il y a longtemps : « J’avais fait acte de candidature pour travailler sur la collection et signé trois titres dont le Noël d’Hercule Poirot. Cette fois j’avais émis quelques réserves pour l’histoire qui n’était pas ma préférée. On n’est pas dans un vrai crime ». Mais chut, elle a vite changé d’avis. Un rubis dérobé, un manoir où se rassemble, tradition Christie oblige, une belle palette de suspects, un meurtre mais avec Poirot méfiance. « Pol m’a convaincu qu’il fallait travailler sur l’atmosphère plus farce que dans les autres Agatha », ajoute Isabelle. Pour confirmer il suffit de regarder le dessin chaleureux, rondouillard et gourmand de Tarcido. « Dans le précédent album » précise Isabelle, « le Noël, je lorgnais vers Scrooge, Dickens. On a exagéré les caractères en caricaturant presque Poirot. On a pris beaucoup de plaisir à faire cet album ». Un titre qui fait date dans la collection, humanise Poirot, qui aime bien les sucreries et a sa part de suspense soumise à un rebondissement très surprenant.

Une collection remise à jour

Pol Beauté éditeur chez Paquet a été le créateur de la collection en 2017 : « A l’origine Pierre Paquet rachète les éditions Emmanuel Proust avec la collection Agatha Christie, 24 albums mais à trop faible pagination. Agatha Christie c’est bavard, explicatif, avec beaucoup de personnages. Nous avons décidé désormais de faire des beaux livres avec une forte pagination ». Lady Agatha Christie est un monument, universalement connue. Olivier Dauger dessinateur de deux enquêtes de Miss Marple avec Dominique Ziegler au scénario, le dit : « Son public est assez féminin, toutes générations confondues. Les lecteurs viennent pour Agatha, pas pour nous. Ils sont sensibles à l’esprit collection ». L’un des fleurons de l’éditeur Paquet, Pol Beauté le confirme : « Elle a pris sa place dans le catalogue avec son lectorat. Pour nous le but est de nous diversifier comme adapter La Mort n’est pas une fin, le seul roman policier de l’autrice qui ne se passe pas au XXe siècle mais en Égypte ancienne. Je ne voulais pas rester dans une zone de confort et proposer autre chose au lecteur ».

Planche extraite de l'album "Hercule Poirot - Christmas Pudding" © Paquet

Fred Brémaud est aussi l’un des scénaristes de la collection. « J’ai signé quatre Hercule Poirot et les deux Rendez-vous à Bagdad. J’en ai un autre en chantier, La Maison biscornue. Au départ, Pol Beauté m’a demandé si cela m’intéressait de participer à la collection. J’ai dit oui à condition de faire ABC contre Poirot, le premier roman d’elle que j’avais lu en anglais. Alberto Zanon le dessinateur voulait travailler en France et on a décidé de faire ensemble cet album ».

Une étrange disparition

Agatha Christie née en 1890, décédée en 1974 a traversé le XXe siècle. 66 romans, 154 nouvelles et 20 pièces de théâtre. Arsène Lupin et Sherlock Holmes lui mettent le pied à l’étrier. Sa sœur la convainc d’écrire un polar publié en 1920. Elle mettra elle-même en scène sa propre mystérieuse disparition en décembre 1926. Coup de pub ou vengeance contre un mari volage ? Un peu des deux.

Planche extraite de l'album "Hercule Poirot - Christmas Pudding" © Paquet

On ressent dans les propos des auteurs toute la passion qu’ils éprouvent eux-mêmes pour le talent d’Agatha Christie sans pour autant en être des spécialistes. Brémaud en a beaucoup lu jeune en anglais « mais pas je ne suis pas vraiment un spectateur des films ou des séries. Je suis surtout un grand lecteur de polars. On commence souvent par elle. En dédicace je m’aperçois que tout le monde connait Poirot. Avec Bagdad on touche les fans qui veulent voir ce qu’on a fait de la série, lire la BD pour avoir le plaisir de redécouvrir autre chose ». Dauger, lui, « avait lu il y a longtemps les plus connus, puis vu les séries. Je trouvais savoureuse l’ambiance rétro, l’univers anglais très agréable à traduire en dessin ».

Beaucoup de huis-clos

Pol Beauté choisit les titres pour la collection chez Paquet : « On a 20 titres, dont le dernier en fin d’année et trois mangas. Je fais un choix en équilibrant la parution de titres reconnus comme Mort sur le Nil ou moins célèbres comme les Beresford. Miss Marple aura bientôt une nouvelle équipe d’auteurs après Dauger et Ziegler. Depuis 8 ans j’ai tout relu de Christie ». L’éditeur est persuadé qu’il faut aimer Agatha Christie pour l’adapter correctement. « Je demande aux auteurs de l’exigence. Souvent ils me surprennent comme Isabelle Bottier par leur connaissance. Une adaptation est une trahison mais respectueuse ». Dauger pour le dessin trouve qu’il y a « beaucoup de huis-clos. Pas évident des faire vivre des personnages dans une pièce et parfois je demande au scénariste de placer la scène à l’extérieur ». Brémaud est entre deux : « On fait des choix de coupure sur des actions pas sur des faits essentiels, sans frustration du tout. Vous savez on met presque le même temps à lire l’album que le roman ». Pour Isabelle Bottier « ce n’est pas difficile que çà adapter quand en plus on connait bien cet univers. Une fois qu’on a fait des choix c’est intuitif ».

Une saga sans fin la collection Agatha Christie pour Paquet. Il y a encore de quoi tenir la route longtemps avec un public conquis. A lire aussi Une autobiographie, bouquin passionnant qu’elle a écrit avec un vrai recul sur elle-même. Enfin pour les accros de jeux vidéo Microids sort l’édition limitée de Agatha Christie – Mort sur le Nil le 25 septembre 2025.

Article publié dans le mag ZOO n°106 Septembre-Octobre 2025