Entre œuvres d'art volées, romance, secret de famille, vengeance et amour de la musique, les auteurs brossent une fresque passionnée débutant à Berlin dans l'immédiat après-guerre avant de se poursuivre aux USA plusieurs années après.
Disons-le tout net : le dessin d’[{RED_PFN-6816}]Alexandre Clérisse{/RED_PFN-6816}] a une classe folle et le scénario de Thierry Smolderen est envoûtant. C'est un beau film noir et glamour des années 50 qu’ils nous offrent. Pardon, une belle bande dessinée contant une histoire qui s’étale sur quinze ans. Smolderen aime développer des trames narratives avec un brin de complexité. Il ne s'est pas perdu en route et on adore le suivre sur toutes les pistes qu'il nous propose, entrecoupées d’éclipses temporelles ou de flashbacks rythmant le récit.
Avec Clérisse, il a su développer des personnages attachants, tant sur leur personnalité, leur vécu, que sur leur caractérisation physique. Norman Bold à l’humour caustique, pas très beau mais qui deviendra un quadragénaire « passable », selon l'attachante Clarisse d’Arcier dont il est secrètement amoureux. Le séduisant Jay Jay Johnson, Afro-américain qui se renferme après avoir pris de plein fouet le ségrégationnisme alors prégnant. L’hitchcockienne Clarisse, une jolie fille de générale devenue aveugle lors d'une attaque de train. Qui aime-t-elle réellement ? Il y a aussi « V. », le mystérieux adolescent vivant dans les ruines de Berlin, prodige de l'harmonica et du piano. Et les auteurs ont leur Axel Borg : l'inquiétant Père Draganovic, amateur d’art, ayant la phobie des oiseaux.
La musique est un lien entre Norman, Jay Jay et Clarisse. Parlons-en, de la musique ! Dans les échappées langoureuses du saxo, le dessin de Clérisse se rapproche du cubisme, devient pure sensation. Et parlons-en, du dessin ! La stylisation classieuse des personnages, le choix averti des couleurs, une caresse pour l'œil. L’artiste cisèle chacune de ses cases. On aime les contempler, y revenir. On est en même temps porté par l'histoire. Quel tourbillon !
Si les précédentes collaborations entre les deux auteurs étaient déjà bien sympas, ici on est un cran au-dessus. Une réussite totale.