Dans une maison bordée de pins, des enfants célèbrent l’anniversaire de leur mère. Quand la nuit s’installe, l’une des filles la pousse à se confier : quel fut son geste d’audace ? Lola Lafon et Pénélope Bagieu signent un récit tendre et réconfortant.
La fin d’année orchestre souvent le retour en librairie de figures majeures de la bande dessinée et de la littérature. Pour ce nouveau roman graphique, Pénélope Bagieu, autrice incontournable du 9e art, s’associe à Lola Lafon, romancière à la plume aussi affûtée que nuancée, pour nous offrir La Nuit retrouvée, un récit où l’émotion se glisse dans le souvenir partagé.
La poésie de la délicatesse
Une mère effacée, une fille curieuse, une nuit dans les Landes : il suffit parfois d’un souffle d’insomnie pour que les paroles, longtemps contenues, s’échappent - et qu’une question, un peu insistante, vienne réveiller une histoire enfouie.
Alors la mémoire affleure, hésite, s’aventure à dire un amour ancien, vécu entre femmes, dans la discrétion et la tendresse. Lola Lafon signe un scénario pudique, presque musical : phrases mesurées, gestes éloquents, ironie légère pour lever la gêne. C’est un récit de fidélité à soi, centré sur ces instants fugaces qui, par la force des émotions qu’ils suscitent, marquent une vie. Son écriture, tout en finesse, éclaire sans insister. Il suffit de quelques mots, de quelques silences, pour que tout s’éclaire.

Extrait de La Nuit retrouvée, par Lola Lafon, Pénélope Bagieu et Drac. © Gallimard 2025
Pénélope Bagieu épouse ce rythme très intérieur : cadrages serrés, regards suspendus, tasses serrées à deux mains, sourires gênés - tout autant que l’action principale, les détails de l’image deviennent récit. Drac, coloriste fidèle à la dessinatrice, sublime l’ensemble en installant la nuit comme un écrin, avec ses couleurs feutrées, avant d’éclairer les jours de teintes lumineuses et vibrantes.
Comme une confidence tenue à voix basse
Pourquoi lire ce livre ? Parce qu’il choisit le murmure plutôt que le pathos, la justesse plutôt que le drame. Parce que la relation d’Hélène, la mère, et de Faustine, la fille, y est aussi simple qu’authentiquement touchante. Et parce qu’il nous rappelle, à toutes et tous, qu’il faut parfois oser sortir de soi - pour vivre, enfin, ce que l’on n’avait jamais su formuler tout haut.