Accélération dans cet acte 4 où l’on apprend enfin la connexion entre des mondes très différents reliés par deux jeunes qui rêvent l’un de l’autre sans se connaître. Il est urgent de découvrir cette bonne série d’anticipation, avec un dessin véhiculant bien une impression d’étrangeté diffuse.
Que dire de cette série ? Deux univers avec leur part de dureté mais aussi de poésie fugace, via un graphisme joliment léché. Le rapport de l'homme à l'environnement, l'amitié, les jeunes qui se construisent. Et beaucoup de mystère !
La patte de Leo dans les thèmes est reconnaissable. Et le sens de la narration de Rodolphe est une fois de plus convaincant. En effet, Leo et Rodolphe scénarisent à quatre mains cette série, comme ils le font depuis déjà deux décennies en racontant les aventures de Kathy Austin (le cycle Kenya et ceux qui suivent, Scotland étant celui en cours). Demain est une série différente présentant deux mondes que l'on suppose parallèles.
Demain est une série différente présentant deux mondes que l'on suppose parallèles. © Demain, T.4 - Delcourt
Ils rêvaient d'un autre monde
Dans un futur indéterminé, une jeune femme, Fleur, et son père tentent de survivre dans une Europe exsangue. Leur périple les mène au Moyen-Orient où la mort est tout aussi présente. Une projection des craintes des scénaristes quant à notre futur ? On découvre aussi quelques animaux étranges chers à Leo. Ailleurs, quelque part, on retrouve, semble-t-il, la société américaine du début des années 60, en apparence lisse, blanche et sécurisée. Mais comme partout, la jeunesse aspire à tester les limites. Et la ville en apparence normale dans laquelle vivent Jo et ses amis cache bien des secrets, dont un passage vers un Ailleurs interdit…
Dans ces deux mondes, la violence est présente. De manière très explicite en Eurasie où les Etats se sont désagrégés, laissant la place à la loi du plus fort, aux gangs et à l’individualisme ; de manière bien plus sournoise dans cette ville nord-américaine figée dans le temps.
Demain, T.4 © Delcourt
Une ambiguité esthétique
Le dessin de Louis Alloing est à l'image de l'histoire : à la fois séduisant, rassurant par son classicisme de bon aloi, mais inquiétant par tous les points de décalage suggérés. Un personnage au physique avenant peut se révéler fourbe voire dangereux. La mise en couleur avec un grain façon aquarelle offre un confort bienvenu à l'œil dans ces univers déstabilisants. Alloing est ravi de dessiner le monde postapocalyptique, car il a déjà beaucoup dessiné les années 50 et il ne veut pas être catalogué « dessinateur de vieilles voitures américaines » !
Dans ce tome 4, une révélation majeure (enfin) : le lien entre ces deux mondes. Mais tous les mystères sont loin d'être résolus. Le tome 5 devrait être le dernier acte de ce cycle.
Article publié dans le Mag ZOO N°101 Novembre-Décembre 2024