Le Congo Belge de 1960 sert de décor à une aventure du célèbre Pimpin reporter et de son fidèle compagnon Mildiou. Caricatures et anachronismes au temps des colonies.
Il faut assurément de l’audace à un dessinateur pour s’attaquer à Tintin au Congo d’abord parce que l’œuvre d’Hergé reste un pan de l’histoire de la BD, ensuite car dans le contexte actuel de « cancel culture » l’évocation de cet album est toujours hautement inflammable, enfin car les ayant-droits sont très sourcilleux quant aux références sur le héros à houppette.
Pimpin, le personnage principal de Lipanda
©Bangediciones
Lipanda (indépendance en Lingala, l’une des langues du Congo) raconte les derniers jours du Congo Belge, où se trouve le journaliste Pimpin, raciste, machiste et égocentrique, bien loin du personnage aseptisé, imaginé par Hergé. De même, les Dupondt, policiers manipulateurs, profitent allégrement des bordels de Léopoldville. Cet ouvrage caricature la colonie congolaise en enclave tellement belge que la fricadelle, les frites et la bière font office de marqueurs culturels. La ligne claire est elle-même gentiment moquée, tout comme les mises en scènes qu’Hergé affectionnait. L’histoire reste cependant un peu brouillonne, assez loin en cela du style du maître.
Bazil dessine un Pimpin ouvertement ségrégationniste comme pour mieux faire ressortir le paternalisme maintes fois dénoncé du Tintin au Congo. A forcer le trait, il manque néanmoins ce qu’Hergé n’avait pas non plus su évoquer: l’exploitation économique et cruelle au prix du sang et de souffrances, mais aussi, malgré tout, la culture vivace, résiliente et riche du « Kongo ». Ni Tintin, ni Pimpin ne les ont montrées. En 1960, pourtant, les artistes, les intellectuels, les musiciens et les danseurs congolais jouèrent un rôle majeur dans "L’indépendance cha cha » (titre fameux d’une chanson congolaise) que l’auteur passe malheureusement sous silence.
0 0