Le Livre des Multivers - T1

Une plongée dans les voyages fantastiques de Marco Polo, de l’Italie du 13ᵉ siècle au Japon moderne, en mode univers parallèles, guerrière invincible et créatures monstrueuses. Dépaysement assuré.

L'idée semble simple à première vue. Marco Polo est désormais un ado à lunettes chargé de veiller sur ses trois jeunes frères et sœurs, suite à l'abandon de leur père Niccolò, parti explorer le monde. La situation est si désespérée que le garçon prend n'importe quel emploi qui se présente, se retrouvant finalement mousse sur un navire marchand. En pleine mer, l’équipage se fait attaquer par une créature marine qui coule le bateau. Marco reprend alors ses esprits et réalise qu'il se trouve désormais sur le continent asiatique, à proximité d'une ville gouvernée par un seigneur qui, pour consolider son pouvoir, tient fréquemment des combats de monstres. L'un d'eux parvient à s'échapper et, dans la mêlée, prend la forme d’une magnifique guerrière appelée Wolhyang. Elle décide d’aider Marco à revenir chez lui et à percer les mystères que son père, disparu dans la nature, lui a jusque-là dissimulés. Cependant, la situation se complique encore plus à partir du moment où Marco et Wolhyang sont soudain transportés à Tokyo, de nos jours…

Beaucoup de tout

Tout de suite, ce qui marque la lecture de ce premier volume, c'est le grand nombre d’informations qu’il faut digérer rapidement. Une multitude de rebondissements en tout genre nous sont glissées sans ménagement, et à un rythme soutenu dans des ambiances très différentes les unes des autres. On intègre alors, sans se poser trop de questions, le concept des sauts spatio-temporels. On accepte la nature encore assez mystérieuse de Wolhyang et son attachement très « tactile » à Marco. On comprend surtout qu’il ne s’agit que du début, des réponses viendront ensuite, ainsi que certainement d’autres questions.

Des planches explosives

En contrepartie, le graphisme ultra énergique de Boichi balance tout ce qu’il a. Il force toutes ses perspectives, accompagne chaque geste de raccourcis audacieux, de déformations, d’effets de vitesse, d’explosions, d’énormes onomatopées dans tous les sens. C’est sans oublier une hyper-expressivité dont il a le secret, qui participe grandement au sentiment d’urgence qui habite le scénario de In-Wan Youn. On ne peut qu’être, à nouveau, impressionné par la performance de l’artiste coréen qui transcende complètement les aventures de Marco, en proposant des cadrages alternant des plans très serrés et des vues panoramiques bourrées de détails.

Plus que jamais au sommet de son art, Boichi se fait visiblement plaisir avec des planches où il peut mettre en image tous ses sujets favoris, qu’il s’agisse de scènes d’action bien viriles, de très belles héroïnes aux postures particulièrement suggestives, de créatures tout droit sorties des enfers, sans oublier cette façon de mêler un trait un peu cartoon avec un traitement semi-réaliste extrêmement précis et fin. Ça nous offre de très beaux portraits qui glisse vers des grimaces déformées pleines d’humour. Comme il a pu le prouver sur ses précédentes séries phares comme Sun-Ken Rock, Origin, Dr. Stone ou encore sur les très fun One Piece : Épisode A, il s’est progressivement rendu maître d’une esthétique très soignée qui ne sacrifie pourtant rien à l’énergie souvent spectaculaire de chacune de ses pages.

Au cœur de l’actualité avec deux sorties en avril, chez Glénat : le 27e et dernier tome de Dr Stone, ainsi que le premier volume des Boichi SF Short Stories, l’artiste a encore de quoi combler ses nombreux fans qui guettent la moindre de ses sorties.

" le graphisme ultra énergique de Boichi balance tout ce qu’il a " © Pika, 2025 - Boichi

Article publié dans le Mag ZOO Manga N°19 Mai-Juin 2025