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Au coeur des Monstres

Film singulier devenu un classique de l’histoire du cinéma, Freaks (1932) de Tod Browning continue d’inspirer les artistes les plus divers. En témoignent deux bandes dessinées intenses : Freak Parade et Tête d’épingle.

Dans leur troublant et sulfureux Freak Parade, Fabrice Colin et Joëlle Jolivet s’attachent au tournage du film de Browning. Ils centrent leur récit sur Harry Monroe, quatrième assistant réalisateur. Ce personnage inventé témoigne de la démarche des auteurs : réaliser une fiction qui, par des éléments documentaires (portant sur les phénomènes jouant dans le film comme sur le fonctionnement des studios hollywoodiens), éclaire le lecteur sur le tournage hors norme de Freaks, tout en proposant une analyse de cette œuvre.

En plein tournage du film de Browning

En plein tournage du film de Browning

Scénariste et dessinatrice jouent habilement avec des situations, des dialogues et des images du film qu’ils projettent dans le contexte du tournage. Cela produit un effet tout à fait surprenant pour qui connaît le film qui les inspire. Dépassant le simple hommage, ils conduisent leur récit sur des terrains cauchemardesques qui évoquent ceux où s’aventurent quelques-uns des cinéastes héritiers de Browning, David Lynch et Tim Burton en tête. Freak Parade est ainsi un album surprenant qui devrait déstabiliser plus d’un lecteur et combler les amateurs d’univers singuliers.

Eclairage du tournage hors norme de Freaks

Eclairage du tournage hors norme de Freaks


À la (re) découverte de Schlitzie

Personnage important dans Freak Parade, Simon Metz dit Schlitzie est au centre de Tête d’épingle. Cette bande dessinée impressionnante est l’œuvre d’une vie : depuis 1963, Bill Griffith est fasciné par le plus magnétique des trois microcéphales de Freaks et il s’en est inspiré pour créer son personnage, Zippy tête d’épingle. L’existence de Schlitzie étant documentée de manière lacunaire, l’auteur n’hésite pas à s’intéresser plus largement à la culture foraine (ses lieux, ses traditions et ses acteurs), comme l’indique le sous-titre du livre : « Vie et époque de Schlitzie le microcéphale ». Ce parti pris génère un ouvrage dense et varié totalement captivant. Griffith parvient à combiner richesse informationnelle et tendresse, description des faits et créativité artistique. Tête d’épingle porte ainsi en permanence un regard humaniste et bienveillant, ce sans jamais éluder la dureté qui pouvait accompagner l’exhibition foraine.

Article publié dans le Mag ZOO N°78 Nov-Déc 2020

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