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Intelligence artificielle, sentimentalité lourdement concrète

Il est vaguement question de l’âme naissante à travers le numérique au cœur de Sing a bit of Harmony. Joliment exécuté, le film de Yasuhiro Yoshiura pêche parfois par son rythme en dents de scie et son immaturité générale.

La solitaire et cérébrale Satomi réalise instantanément que quelque chose cloche avec la nouvelle qui vient de débouler dans le lycée de sa ville sans histoire. Elle s’appelle Shion, elle est belle et excessivement enjouée et se dirige vers elle tel un missile à tête chercheuse pour lui demander instantanément au beau milieu de la classe si Satomi est heureuse... avant de pousser la chansonnette. Et pour cause : Shion est un robot doté d’une intelligence artificielle évolutive dernier cri largué secrètement dans la nature pour les besoins d’une expérience conduite par le conglomérat cybernétique local. L’objectif ? Faire sa place dans la faune lycéenne sans se faire repérer à moyen terme, ce qui survient in fine assez vite. Satomi et quelques-uns de ses amis décident néanmoins de garder le secret, car la cheffe du projet n’est autre que sa mère qui pourrait perdre son travail en cas d’échec avéré.

Un fourre-tout thématique 

En bon représentant de l’animation japonaise contemporaine, Sing a bit of Harmony mélange beaucoup de genres. Ainsi, la thématique du passage à l’âge adulte, la comédie musicale, la comédie romantique et la science-fiction quasi anticipatrice y sont jetées en quantité équivalente dans la moulinette d’un mixeur à puissance maximale. L’ambition est décelable et mérite d’être saluée. Elle engendre une mixture qui, bien qu’agréable, manque de subtilité. Grand admirateur de Philip K. Dick et Isaac Asimov, Yasuhiro Yoshiura explore à nouveau après son remarquable Time to Eve les enjeux futurs de la robotique dans le quotidien et les relations humaines et artificielles. Mais la tonalité adolescente intentionnelle accouche d’une inconstance et une immaturité générales qui finissent par plomber le rythme de Sing a bit of Harmony.

Intelligence artificielle, sentimentalité lourdement concrète

Feu d'artifice formel

Bien qu’effleurée, la thématique de la recherche du bonheur personnel et des sentiments naissants n’est pas dénuée d’intérêt, car elle se voit rehaussée par la réalisation toujours plus maîtrisée de Yasuhiro Yoshiura. Le théâtre de l’agglomération moyenne technophile et envahie par une robotique/domotique avec ses champs de panneaux solaires et de turbines éoliennes gracieuses au service de ses citoyens est sur ce point une réussite à mettre à son crédit. Mais c’est surtout dans les passages où les frontières essentielles entre Satomi et Shion s’estompent à travers une reconnexion mémorielle et affective que fait des étincelles. Là, le tourbillon de couleurs, de souvenirs et de sensations matérialisé à l’écran se montre alors beaucoup plus vivant que les clichés dépeints auparavant.

Article publié dans le mag ZOO MANGA N°5 Septembre-Octobre 2022

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