« Je souhaite dans ma maison : Une femme ayant sa raison, Un chat passant parmi les livres, Des amis en toute saison. Sans lesquels je ne peux pas vivre. » écrivait Guillaume Apollinaire. Ainsi va la vie de Serge dont le récit témoigne l’amour qu’il porte aux chats.
Sugar est un album sobre. La couverture qui évoque l’affiche de la Tournée du Chat noir, manque un peu de lisibilité, ce qui peut décourager. Surtout ne vous y arrêtez pas car le récit, bien que convenu, offre un joli spectacle grâce à son découpage inventif.
Sugar est mi-siamois, mi-chat de gouttière. Avant lui, il y a eu Tim et Jeff, deux chats morts prématurément. Pendant lui, il y aura Milk. Petite chatte qui voulait devenir plombier et en paiera le prix. Après lui, il y aura… Tant de chats peuvent passer dans la vie d’un homme. Sugar, lui, s’est attardé et connaîtra dix-huit années de bonheur avec ses humains.
L’histoire traite presque chirurgicalement une vie de chat. Le texte est rare et souligne l’intérêt porté au sujet. L’album concerne peu les humains somme toute et la narration témoigne de ce que les chats entendent ou pensent.
Si le trait est un peu raide et manque de séduction, le cadrage confère beaucoup d’intérêt à Sugar. Les cases serrées sont parfois envahies par une silhouette qui les explose. Quand ce n'est pas une illustration pleine page qui est fractionnée et ne fait sens qu'avec le recul.
Le tout rend très vite compte du monde vu par les chats. Les phares de voiture éblouissent le lecteur en même temps que le pauvre Tim et c’est bien le visage d’Ann, la mère, qu’on voit se pencher sur nous alors que Jeff agonise.
Sugar est donc un album intéressant par son traitement narratif. Toutefois, la froideur du trait ou la distance trop marquée avec les personnages autres que félins expliquent probablement que l’émotion n’est pas complètement au rendez-vous.