Bibelosse est la ville idéale pour tous les écrivains, libraires, cruciverbistes et amateurs de bons mots. Pourtant, dans cet Eden où la lettre est sacrée, le ver est déjà dans la pomme. Cela ne fait aucun doute, un tueur sévit au paradis. L’enquête commence alors dans ce bel album, intelligent et truffé de références BD, où les mots sont manipulés avec talent.
L’inspecteur Sandé n’est pas un homme de lettres, pourtant il va devoir naviguer entre figures de styles et meurtriers potentiels afin de résoudre son enquête. Et ce ne sont pas les fanas de voyelles, l'Edgar P. Jacobs local ou les cruciverbistes dyslexiques qui vont lui faciliter la tâche.
François Ayrolles a passé 10 ans à imaginer, mettre en forme et créer cet album. Le résultat est d’une grande finesse de langage, extrêmement recherché au niveau à la fois littéraire et bédéistique. Les amateurs y noteront de nombreuses références à des albums bien connus. Un bémol cependant, à force de chercher la perfection linguistique, le lecteur pourrait avoir l’impression de lire un dictionnaire ce qui relâche un peu son attention.
Il n’y a pas que dans le fond que François Ayrolles a pioché ses références. Dans une atmosphère qui parvient à la fois à être colorée et incolore, la forme nous permet de reconnaître certaines figures déjà croisées dans d’autres albums de la plume d’autres auteurs. Le type énervant par exemple, ne ressemblerait-il pas à Séraphin Lampion, archétype du casse-pied dans Tintin ?
Une affaire de caractères est une affaire de goût qui peut nous dévoiler la diversité de la langue française tout comme elle peut nous en dégoûter. Mais l’exercice, remarquable, mérite au moins une lecture.
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