Les Coups de coeur du 28 janvier
Deux coups de coeur pour deux BD traitant du réel à leur manière... Une histoire d'amour détruite par le racisme Le rejet de l'autre n'est pas né d'aujourd'hu
28 janvier 2016
-Actualité
Sébastien Morice, Didier Quella-Guyot
Éditeur : Grand Angle
Scénario : Didier Quella-GuyotDessin : Sébastien Morice
Collection : Grand Angle
Genres : Historique, Sentimental
Public : Tout public
Prix : 13.90€
Scénario
5.0Dessin
5.0Malmené par la vie, le père Antoine Boitelle se remémore sa chère jeunesse : lorsqu’il était soldat au Havre, à rêver devant les navires en partance pour les pays lointains ; son coup de foudre pour la belle Norène, une jeune Africaine serveuse au Café des colonies. Si le jeune Antoine vécut une immense passion, il se heurta également à la laideur du racisme quotidien et à la résistance de ses parents, paysans, face à un mariage beaucoup trop « coloré » à leur goût.
Le rejet de l'autre n'est pas né d'aujourd'hui. Cette adaptation fine d'une nouvelle de Maupassant raconte l'histoire du soldat Boitelle, tombé en amour de la serveuse noire Norène, à la fin du XIXe, au Havre. Un dessin étourdissant, des couleurs comme un lever de soleil. Pour faire passer la pilule, amère, du racisme primaire.
XIXe siècle, en Normandie. Soldat au Havre, Boitelle tombe amoureux de la belle Norène. Avant d'être adoptée par une poissonnière, elle est arrivée d'Afrique via New York lorsqu'elle était bébé. Mais elle ignore ses origines. Boitelle veut se marier avec elle mais ce serait aller contre l'avis de sa famille. Son père et surtout sa mère, la trouvent « trop noire ». Il se résigne. Chacun va faire sa vie de son côté.
Cette très belle nouvelle de Maupassant adaptée en BD par Didier Quella-Guyot montre que le racisme et la xénophobie n'ont pas d'âge. Le plus surprenant et décevant reste que ce rejet de l'autre non seulement perdure, mais s'amplifie. Réédition d'une histoire touchante aux personnages bien campés, ce texte tombe à point nommé.
Quel niveau graphique ! L'absence apparente d'encrage noir donne au dessin de Morice une profondeur de champ et une vivacité saisissantes. Sa mise en couleur est criante de réalité. Son trait poétique, les regards de ses personnages pétillants d'humanité. Il croque avec justesse le racisme, la peur de l'autre d'un côté. De l'autre, la beauté de l'amour naissant, l'envie de partager son existence. Après l'histoire principale, le devenir de Norène est raconté en texte illustré.
Boitelle et le Café des Colonies est un concentré des idées archaïques de la France d'avant, qui perdurent malheureusement. Boitelle est devenu vidangeur de basses besognes et père de quatorze enfants. Il estime sa femme, mais n'éprouve pas pour elle l'amour qu'il ressentait pour Norène... Une histoire aussi triste que son dessin est gai.