Les guerres civiles sanglantes inspirent rarement des BD comiques, à part quand on s’appelle Gyps et Lounis Dahmani. Dans Oualou en Algérie les deux auteurs franco-algériens signent une enquête policière atypique, qui exorcise avec humour un épisode tragique de leur pays d’origine.
Alors que le détective Nadir Oualou s’ennuie ferme dans son cabinet dans le 9-3, Nicole Benamou débarque, complètement désespérée. Voilà des années que cette mère a été séparée de sa fille Mina. La faute à son ex-mari Saïd, ancien membre du Front Islamique du Salut qui, durant les années 90, terrorisait une Algérie plongée en pleine guerre civile. Une sale affaire pour l’inspecteur « français comme Zidane ». Pour aider sa cliente, il doit retourner au « bled », qu’il éviterait bien volontiers...
En ouvrant Oualou en Algérie, on découvre « la décennie noire ». Pendant dix ans ce bras de fer a opposé le gouvernement à la montée des groupes islamistes. Si clichés et autodérision ponctuent allégrement cette enquête truculente, ils sont bien maîtrisés et dévoilent les détails du conflit sans le minimiser.
On s’amuse notamment devant les mésaventures de l’inspecteur Oualou, véritable hommage au détective Palmer de René Pétillon. Fier de sa « France black, blanc, beur », le héros s’ouvre pourtant à la terre ses parents, bien qu’ennuyé par les frères Batata, versions maghrébines des Dalton. Un beau message sur la fierté des racines, couplé à un clin d’œil tordant aux classiques franco-belges !
Pour cette BD hilarante, Gyps n’aurait pas trouvé meilleur allié que Lounis Dahmani. De la matrone caractérielle au cousin du bled en galère, le dessinateur croque d’un œil tendre et taquin des personnages à la fois stéréotypés et attachants.
Une façon belle et touchante pour le duo de vanter l’Algérie toujours belle, même minée par les extrêmes et les atrocités qu’elle endure.