À l’issue de Mon traître, l’image laissée par le personnage central de cette histoire, Tyrone Meehan, n’était guère flatteuse. Il avait trahi son camp en se mettant au service de l’occupant anglais. Ce second tome vient éclairer le parcours de celui que ses pairs ont longtemps pris pour un héros et qui, manipulé et soumis à un chantage permanent, n’a guère eu d’autre choix que de servir le camp ennemi. Pierre Alary conclut brillamment l’adaptation des deux romans de Sorj Chalandon.
À l’issue de ces décennies de guerre civile opposant les catholiques aux protestants de l’Irlande du Nord, Tyrone, trahi à son tour par ceux avec lesquels il a collaboré, se sait condamné par les siens. Il décide de consigner par écrit comment il en est arrivé à jouer son rôle de Judas. Il raconte comment son père qui, dès 1921, s’était engagé parmi les volunteers de l’IRA dans la lutte contre la partition de l’Irlande, a disparu sur une plage, usé par les années de lutte, les désillusions et l’alcool.
Dans le dénuement, la veuve et ses neuf enfants sont contraints d’aller vivre chez un oncle en zone « occupée ». Tyrone va très vite prendre conscience de l’antagonisme des deux communautés et prendre fait et cause pour l’IRA. Son histoire s’inscrit au fil des événements tragiques qui ont eu lieu, dont le traitement réservé aux leaders emprisonnés dans les geôles de la dame de fer.
À mesure que défile le récit de Tyrone, l’émotion finit par surgir tout comme l’empathie du lecteur pour ce personnage brisé et acculé à son rôle détestable. Sorj Chalandon qui n’a pas voulu intervenir dans l’adaptation de ses livres peut se féliciter du travail accompli par Pierre Alary dont le trait s’est encore bonifié pour cette suite. Un diptyque à ne manquer sous aucun prétexte.