Alice a emménagé avec son conjoint James dans un bel appartement parisien. Alors que ses parents ont été expulsés de leur habitat, elle leur propose, bien-pensante, de partager l’appartement avec eux de façon provisoire. Mais, Colette, la mère d’Alice, va faire vivre au couple un enfer.
L’action se déroule essentiellement dans l’appartement. Le caractère versatile de Colette, tantôt attentionnée et tantôt envahissante, provoque de nombreuses disputes entre la mère et la fille. Un comportement de plus en plus pervers qui pousse progressivement Alice à trouver refuge hors de chez elle. Les piques à répétition et les crises de sa mère la mènent à vouloir prendre l’air, boire un verre avec un ami pour relâcher sa tension.

Doit-on toujours tout accepter de la part de ses parents ?
© Marabout
Nous accédons à l’état d’esprit de plus en plus nerveux d’Alice. La relation mère-fille est donc prise dans un cercle vicieux psychologique, qui monte crescendo. Le piège semble se refermer sur elle progressivement. Il faut dire que l’attitude pathologique de la mère est fascinante. Au-delà de ces deux personnages, les enfants, le compagnon, le père d’Alice et ses sœurs Marie et Laurence, ne prennent pas vraiment position. Contrairement à sa femme imprévisible, le père d’Alice, en fauteuil roulant, est passif et conciliant.
Pourquoi cette famille si présente n’intervient-elle pas plus dans cette relation toxique entre Alice et Colette ? Que ce soit le père infirme, toujours hors-jeu, qui échappe aux représailles de sa femme ou Laurence, une des sœurs, complice de la perversité de sa mère vis-à-vis d’Alice, la protagoniste semble être l’unique victime de cet acharnement. Elle porte le poids de la culpabilité insufflée par sa famille, et c’en est presque caricatural.
L’interaction entre les personnages est illustrée de façon très dynamique. En effet, le graphisme aux traits fins et vifs apporte du rythme à la narration. Ce dynamisme des dessins nous invite aussi à comprendre les tumultes que vit Alice depuis l’emménagement de ses parents. Mais, ce qui rend la lecture de la BD si singulière, c’est le choix d’apposer, aux traits du dessin noir et blanc, des formes géométriques colorées. Le visage de Collette est d’ailleurs souvent couvert d’une pastille rouge, sur son visage empreint d’une terrible colère.
Il nous semble donc que les couleurs renforcent le caractère expressif des personnages, mais nous nous demandons néanmoins s’il y a réellement une logique constante au choix de l’application de ces couleurs. Grâce à l’illustration, l’album reste aussi prenant que déroutant.