Une bataille épique est au cœur de cet ouvrage magnifiquement dessiné, à la fois plein de bruit et de fureur, mais aussi conté comme une fable par le truchement d’un corbeau caustique et d’une montagne emplie de bienveillance.
Dans la province du Guizhou, dans le Sud de la Chine, l’Empereur Ming a décidé de lever son armée contre le Roi Yang qui vit dans la forteresse de Hai Long Tun. Le personnage principal du récit est la place forte, abordée par le regard croisé de membres de la famille royale, de serviteurs, de soldats, mais aussi de paysans.
Le récit est en outre commenté tout du long par deux personnages peu ordinaires : un corbeau et une montagne. Le corbeau sera les yeux de la montagne, pour lui expliquer ce que font les hommes. Le volatile dresse un constat peu amène sur l’humanité alors que la montagne est d’une bienveillance à toute épreuve. Le choix d’avoir ce regard décalé sur les événements permet des respirations salutaires. Cette guerre semble d’autant plus vaine qu’on n’en connaît finalement pas vraiment la raison. Le Roi lui-même ne fait qu’émettre des hypothèses à ce sujet.
Pierre rouge, plume noire
© Dargaud, 2022
En réalité, on sait peu de choses sur Hai Long Tun, si ce n’est qu’elle fut le théâtre de combats entre le Roi et l’Empereur. Thierry Robin a réalisé cette BD suite à une commande des autorités du Guizhou. En fin d’album, vous découvrirez un supplément passionnant narrant cette expérience. Le dessinateur a pu s’installer en Chine, où il vécut 5 ans. Dont 3 consacrés à cette copieuse histoire dans laquelle il montre toute la mesure de son talent graphique. Voilà un auteur, adepte de cadrages originaux, qui n’est pas avare en décors ou en nombre de personnages dans une même case. Il nous offre vraiment de la BD à grand spectacle.
La mise en couleur, à l’ordinateur, par Pan Zhiming est plutôt bien venue, notamment dans le choix des teintes, même si elle manque un peu d’aspérités, de matière.
A noter que Pierre rouge et plume noire devait paraître en 2020 sous le nom de Hai Long Tun chez un petit éditeur, les éditions du Long Bec, qui a alors déposé son bilan. Souhaitons à Thierry Robin le succès que mérite cette histoire chez Dargaud.
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