
Cyril Bonin, passionné par l’amour
Cyril Bonin, l’auteur d’Amorostasia était de passage à Paris pour la Saint Valentin : le rendez-vous idéal pour revenir sur sa série où l’amorostasie fige des gens dès qu’ils son
15 février 2015
-Interview
Sawako Ariyoshi, Cyril Bonin, Yoko Sim
Éditeur : Sarbacane
Scénario : Sawako Ariyoshi, Cyril BoninDessin : Cyril BoninTraducteur : Yoko Sim
Genres : Roman Graphique
Prix : 19.90€
Scénario
Dessin
Un chef d’oeuvre de la littérature japonaise plein de paradoxes : à la fois beau et cruel, sombre et lumineux, doux et amer ! « Le mont Kudo était encore voilé par les brumes matinales de ce début de printemps. La main serrée dans celle de sa grand-mère, Hana franchissait les dernières marches de pierre menant au temple Jison. L’étreinte de la main autour de la sienne lui rappelait que, maintenant qu’elle allait être admise comme bru dans une nouvelle famille, elle cesserait d’appartenir à celle où elle avait vécu les vingt années de son existence. » À travers le récit des amours, des passions et des drames vécus par trois femmes de générations différentes, Les dames de Kimoto dresse un tableau subtil et saisissant de la condition féminine au Japon depuis la fin du XIXe siècle.
Cyril Bonin surprend ici en allant à la rencontre du Japon de la première moitié du XXe siècle et de la place des femmes au sein de cette société.
Cet auteur est un artiste que l’on retrouve désormais chez de nombreux éditeurs. Les années lui ont permis de développer un style graphique parfaitement identifiable, associé à des univers très différents.
Toyono, Hana, Fumio, Hanako. Quatre générations de femmes, de la guerre russo-japonaise aux Trente Glorieuses. Quatre époques, quatre façons de vivre son statut de femme, entre tradition et évolutions naturelles de la société. Une lignée dont chaque branche pourrait bien avoir des leçons à apprendre de la précédente… et à donner à la suivante.
Les dames de Kimoto © Sarbacane, 2022
Cyril Bonin a fait le choix d’adapter un roman de Sawako Ariyoshi, qualifiée par certains de véritable « Simone de Beauvoir japonaise ». Les Dames de Kimoto est une œuvre nourrie de son histoire personnelle, le personnage d’Hanako possédant de nombreux traits communs avec elle. Une œuvre qui met l’accent sur le poids du patriarcat au Japon, mais aussi sur la capacité des femmes à agir pour la conquête de leurs droits.
C’est donc un Français qui a souhaité offrir un nouveau souffle à l’œuvre de Sawako Ariyoshi. S’il a pu prendre cette place, c’est grâce à la qualité d’écriture des personnages originaux. Écrits avec nuances, hommes comme femmes, ils permettent au bédéaste d’apporter sa contribution à la cause féministe. Il reprend les mots d’une femme sans se les réapproprier. Juste en partageant avec le lecteur la pertinence et la puissance qu’il y a lui-même trouvée.
Dès la couverture, cela apparaît comme une évidence : le dessin de Cyril Bonin était fait pour mettre en scène ces femmes japonaises. Depuis de nombreuses années, il y a une sensibilité dans son dessin, une délicatesse dans ses portraits de femmes, qui appelaient à un tel univers. Il y a autant de forces et de faiblesses dans ses interprétations, qu’il y en avait dans les personnages d’Ariyoshi. Bonin, c’est aussi une économie de traits dans les visages, qui contraste avec la précision de ses décors.
Les Dames de Kimoto s’avère donc une belle façon de découvrir ou redécouvrir une autrice japonaise qui ne craint pas de regarder en face ses semblables dans toute leur complexité.