Celui que tu aimes dans les ténèbres

Une petite pépite graphique soutenue par un scénario efficace à défaut d’être follement original. On se plait à suivre les errances créatives et amoureuses de Ro dans une demeure hantée. Une métaphore réussie de l’amour qui aliène. 

Le lecteur est vite happé par le récit grâce au dessin particulièrement accrocheur de Jorge Corona. Cette histoire publiée aux USA en cinq fascicules est éditée en France par Urban Comics en un seul volume. Tant mieux, car la construction du scénario de Skottie Young, auteur Marvel, s’y prête bien. On peut regretter qu’il ne soit pas plus riche en surprises. Cela dit, le récit est agréable à lire, oscillant entre romance et horreur.  

Celui que tu aimes dans les ténèbres
© Urban Comics, 2022

Ro est une jeune artiste qui a eu son petit succès, mais en panne d’inspiration. Elle s’installe dans une maison réputée hantée. Fantôme ou pas fantôme ? Elle aimerait bien que celui-ci lui apparaisse. Et tout en cherchant l’inspiration devant son chevalet, elle lui parle comme s’il existait réellement. Un jour, le fantôme lui répond. L’effet de surprise passé, il a l’air plutôt sympathique. Il cherche, parfois maladroitement, à faire plaisir à sa nouvelle amie. Qui plus est, l’inspiration revient enfin pour Ro. Elle se sent de plus en plus proche du fantôme, devenu son chevalier servant. Mais l’amour peut virer au cauchemar...  

Jorge Corona, auteur d’origine vénézuélienne, a déjà collaboré avec Skottie Young sur Middlewest. Il offre ici sa palette inspirée, avec un dessin stylé voire stylisé, rappelant autant l’univers du cinéma d’animation (pour lequel il a travaillé), mais en moins lisse, que celui du comics. Parmi ses artistes préférés, on trouve Mike Mignola ou Tim Sale. De solides références. Sa représentation de la vaste demeure aux accents gothiques est très réussie. Quant aux protagonistes, sous son pinceau dynamique et expressif, ils sont tout à fait convaincants. Le visage de Ro se creuse et devient spectral quand la romance vire au cauchemar. Les couleurs de Jean-François Beaulieu complètent à merveille l’ambiance.  

Métaphore sur les dangers d’un amour trop possessif ? En tout cas une « jolie » histoire horrifique.