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Barcelona, âme noire

couverture de l'album Barcelona, âme noire

Éditeur : Dupuis

Dessin : Denis LapièreAuteur :

Collection : Aire Libre

Genres : Aventure, Historique

Prix : 27.95€

  • ZOO
    note Zoo5.0

    Scénario

    5.0

    Dessin

    5.0
  • Lecteurs
    note lecteurs
    0 critique

La critique ZOO sur l'album Barcelona, âme noire

Le duo Lapière/Pellejero signe son grand retour avec une fresque familiale qui nous entraîne entre l’Espagne et la France, dans les pas du petit Carlos, témoin de la mort de sa mère et plus que jamais décidé à ne pas se faire avaler par l’Histoire.

On se souvient des albums Un peu de fumée bleue..., Le Tour de valse et le diptyque L’Impertinence d’un été, le duo Lapière/Pellejero revient en pleine forme, assisté par Gani Jakupi pour le scénario, Eduard Torrents et Martin Pardo pour le dessin et les couleurs. Véritable travail d’équipe, Barcelona, âme noire nous plonge au cœur d’une histoire complexe qui fait traverser l’Espagne franquiste de l’arrivée au pouvoir du dictateur en 39 à sa mort en 75. Cependant, le régime reste au second plan, il n’est pas question ici de proposer un pamphlet politique ou partisan, même si les scénaristes se servent de ce contexte pour installer le cadre du récit, avec ces histoires de trafics entre la France et l’Espagne, l’omniprésence de la police, des combats anti-anarchistes, les mouvements de grève qui se multiplient…

C’est avant tout le parcours d’un homme qui bénéficie, tout au long de sa vie, d’un certain nombre de rencontres qui vont lui permettre de s’en sortir, même s’il plonge de plus en plus dans des affaires louches au fur et à mesure qu’il devient influent.

Barcelona, âme noire

Barcelona, âme noire © Dupuis

Il s’appelait Carlos Moreno Vargas

L’histoire débute en 1948, quand le jeune Carlos part avec des amis pour Marseille. En route, il croise Jocelyne, qui lui propose de travailler pour elle, comme aide dans son épicerie. Elle l’initie alors aux subtilités de la contrebande. Mais le jeune homme ne peut oublier son pays, ceux qu’il a laissés derrière lui. Il ne sait pas encore que son père est secrètement un tueur en série, que sa propre mère a été la première victime, il se souvient juste des attentions de Don Alejandro qui l’a pris sous son aile, des sourires de sa fille Paula, son premier véritable amour, de ces années en suspens, protégé par son mentor. Quand la police le croit coupable des crimes de son père, il devient un fugitif, il rencontre la belle Eva qui l’embauche dans son cabaret et lui laisse prendre de plus en plus d’ampleur. Carlos n’est plus un jeune homme, il devient petit à petit un homme de pouvoir, chef d’un réseau qui va du marché noir au trafic d’influence, en passant par des choses moins glorieuses comme la prostitution…

Nous évoluons dans les milieux interlopes de Barcelone, en marge du pouvoir, un monde ou le bien et le mal ne sont que les notions simplistes d’une réalité beaucoup plus complexe, ou les plus forts avalent les plus faibles sans remord. Carlos n’est que le miroir déformant de cet esprit, double humain d’une ville meurtrie par le temps. Il comprend très vite qu’il va lui falloir jouer le jeu du pouvoir pour ne pas se faire lui-même avaler, quitte à devenir tout ce qu’il ne supportait pas lui-même de voir autour de lui, entre violence, illégalité et revanche…

Barcelona et plus encore…  

Malgré tout, on suit, en substance, le récit d’une ville, d’un pays qui subit de plein fouet la dureté du régime franquiste et ses actions répressives, les milliers de disparitions, de morts, l’économie en berne qui précipite l’émergence du marché noir et la montée de la pègre. La main dans la main, le héros et sa ville évoluent en faisant des compromis, mais en usant des moyens qui s’offrent à eux pour louvoyer entre les mailles.

Denis Lapière et Gani Jakupi ne s’attardent pas sur les « détails » de l’actualité, sur ce qui pourrait soudain faire basculer le récit vers une chronique historique, ils gardent l’optique fictionnelle en développant une intrigue pleine de rebondissements, bénéficiant d’une écriture extrêmement fine, sans pour autant ne jamais être complaisante. Le « héros » est meurtri par la vie, mais il trahit, trompe, tue même à l’occasion, il ne veut absolument pas correspondre à l’image plus lisse que les autres voudraient avoir de lui. Les scénaristes n’ont pas essayé d’en faire un personnage sympathique, mais simplement humain.

Barcelona, âme noire

Barcelona, âme noire © Dupuis

 Une équipe en osmose

On retrouve ainsi cette flamme toute en retenue de Denis Lapière, élégamment équilibrée par la plume de Gani Jakupi. On se laisse porter par le scénario, par la fluidité de la narration, ces jeux entre le passé et le présent, entre les émotions et les rancœurs du récit. C’est une nouvelle fois une très belle réussite, transcendée par le travail graphique du trio Rubén Pellejero, Eduard Torrents et Martin Pardo qui se partagent la tâche, dessinant ici, encrant là, précisant les décors, les expressions, au point où il est parfois difficile de simplement savoir qui a fait quoi. Au final, on a peut-être l’un des meilleurs Pellejero depuis longtemps, car c’est peut-être son style qui ressort le plus.

Barcelona, âme noire figure parmi les belles surprises de ce début d’année. Un album passionnant qui nous emporte dès les premières planches… On imaginerait bien une douce musique d’Ennio Morricone en fond sonore…


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