Quatre amis d’université se remémorent avec nostalgie leurs folles années de jeunesse. Tous rient. Tous sauf Xiao Bao. Lui n’a pas oublié les railleries, les humiliations. Une BD d’horreur sur les conséquences du harcèlement sur la psyché. Effrayant, déroutant, dérangeant.
David en furie © Misma, 2024
Durant leurs années de fac, Da Liu, Xiao Bao, Da Yang et Da Wen sont amis et colocataires d’internat. Devenus adultes, les quatre hommes se retrouvent autour d’un copieux repas et d’une généreuse quantité de bières pour se remémorer le bon vieux temps : le foot, les rivalités amicales, les filles… Mais tous n’ont pas les mêmes souvenirs de cette époque. Alors que l’alcool coule à flots, les langues se délient. Da Wen, beau gosse et leader de la bande, a adoré la fac là où Xiao Bao se rappelle surtout des mauvaises blagues de ses trois amis. À force de brimades, le jeune homme s’est enfermé progressivement dans un monde imaginaire, subissant en silence jusqu’à la cruelle farce de trop…
BD made in China
C’est à 39 ans, en 2015, que Newliu publie sa première bande dessinée aux éditions Zhigentang sous le titre original Angry David. Bercé par le cinéma en noir et blanc et les films de Takeshi Kitano, le style de Newliu rappelle la bande dessinée indé et alternative des années 80-90. Son trait est tantôt semi-réaliste, tantôt surexagéré, cauchemardesque. Ces influences nourrissent ce colossal premier album de 428 pages, fruit de quatre ans de travail.
L’histoire de David en furie est en réalité celle de Xiao Bao, le maillon faible d’un groupe de quatre garçons. L’auteur nous plonge dans ses pensées et son quotidien de victime des moqueries de ses amis. On devine une proximité autobiographique entre Xiao et Newliu lui-même. L’auteur a en effet revendiqué de mélanger des souvenirs personnels à des créations purement imaginaires. Le rapport entre rêve et réalité est le fondement même de David en furie.
David en furie © Misma, 2024
Copains d’avant, ennemis d’aujourd’hui ?
Car, pour encaisser les humiliations de ses copains, Xiao Bao s’invente un alter ego à tête de lapin (digne des pires animatroniques de Five Nights at Freddy’s). Ce personnage fictif reçoit parfois l’aide d’idoles d’enfance de Xiao, comme Zorro ou Maradona. Ces derniers tentent de venger le jeune homme dans ses rêves, somme de fantasmes cruels, sombre échappatoire d’une victime qui espère devenir l’agresseur. Toute la rage contenue de Xiao éclate progressivement dans un crescendo de body horror, entre coups de fouet et scènes de gavage morbide. Jusqu’à l’explosion et la furie du David de Michel-Ange… La fin en surprendra plus d’un.
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