Misanthrope, obèse, atrabilaire, radine, d’une mauvaise foi consternante, Cassandra Darke est vraiment une vielle dame indigne avec laquelle on n’a guère envie de sympathiser. C’est sans compter sur le talent de Posy Simmonds qui a su rendre ce personnage, au-delà de tout manichéisme, d’une grande profondeur humaine.
Propriétaire d’une galerie d’Art londonienne qu’elle a su faire prospérer après que son ex-mari a dû se retirer, Cassandra vit confortablement dans une maison des beaux quartiers de la City. Pour avoir fait dupliquer des sculptures, elle est condamnée à deux ans de prison avec sursis, 200 heures de travaux d’intérêt général et des dommages et intérêts qui vont sérieusement rogner son patrimoine financier et immobilier. En dépit de ses rapports très distants avec sa nièce Nicki, elle finit par accepter de l’héberger dans l’appartement situé au sous-sol de sa maison. Mais la relation de Nicki avec Billy, en butte avec des gens peu recommandables, va tourner au drame.
Après s’être inspirée de Flaubert pour Gemma Bovery, Thomas Hardy pour Tamara Drewe, c’est sur Charles Dickens et son Christmas Carol, que Posy Simmonds a jeté son dévolu pour dresser son nouveau portrait de femme. Mais loin de se tenir au seul personnage de Cassandra, c’est la vision de toute une société plongée dans ses rites qu’elle nous propose de découvrir. La misère que Dickens décrivait dans ses romans est toujours aussi prégnante, le fossé entre riches et pauvres n’a fait que s’accroître.
Fidèle à sa manière de mêler les passages littéraires avec de la bande dessinée dans un savant cocktail qui n’appartient qu’à elle, Posy Simmonds ne pourra qu’enchanter ceux qui suivent son travail depuis Gemma Bovery avec ce nouvel titre. Publié directement en album sans avoir connu de prépublication dans la presse, innovant par un coloriage plus poussé que dans son précédent opus, Cassandra Darke s’inscrit parfaitement dans la continuité d’une œuvre exceptionnelle.
0 0