Voici enfin proposée pour la première fois aux lecteurs francophones, une édition complète des travaux fantastiques et horrifiques d'Alex TOTH publiés dans les magazines cultes Creepy et Eerie. Créateur génial au style simple et élégant que les grands artistes et auteurs des métiers de la BD et de l'animation vénèrent, Alex Toth est en effet considéré comme l'un des plus grands maîtres du Noir & Blanc, avec Milton Caniff, Frank Robbins ou Hugo Pratt.

Eerie et Creepy présentent Alex Toth

Éditeur : Delirium
Dessin : Alex Toth, Bernie WrightsonAuteur : Alex Toth, Bernie Wrightson
Prix : 25.00€
- ZOO
4.5
Scénario
4.0
Dessin
5.0
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Le synopsis de l'album Eerie et Creepy présentent Alex Toth
Leçon de BD en noir et blanc
Rassemblées dans cet exceptionnel volume, les 21 histoires que réalisa Alex Toth pour les magazines Eerie et Creepy, publiés par Warren, du milieu des années 60 au début des années 80, nous permettent aujourd’hui de redécouvrir ce génie du noir et blanc qui mériterait d’être davantage reconnu.
Au firmament des grands noms de la BD US, Alex Toth tient une place de choix, bien qu’il reste encore assez peu connu du grand public. C’est une indéniable référence parmi les artistes qui reconnaissent en lui l’une des grandes influences de l’âge moderne, avec des héritiers aussi prestigieux que Bruce Timm, Darwyn Cooke, John Paul Leon, David Mazzucchelli, Chris Samnee et bien d’autres.
Alex Toth
Né en 1928, Toth a toujours rêvé de rejoindre ce cercle d’auteurs, maîtres du noir et blanc dont faisaient partie des maîtres comme Milton Caniff ou Noël Sickles. À 15 ans, il réussit à vendre sa première histoire puis se fait engager, à 18 ans, par Sheldon Mayer, éditeur chez DC où il se retrouve à dessiner Green Lantern, The Atom et toute sorte d’histoires, allant jusqu’à créer le personnage Johnny Thunder. En 1954, il est appelé pour deux ans sous les drapeaux et part au Japon où il entame son propre strip Jon Fury. À son retour, fâché avec DC, il va travailler chez Dell Comics où il s’occupe, entre autres, de Zorro, une série qui va le révéler. En effet, il excelle déjà dans la gestion des noirs et blancs très contrastés. Il commence déjà à pousser son dessin vers une certaine épure, refusant de le charger d’effets inutiles, mais travaillant très précisément les rapports entre la lumière et l’ombre qui vont devenir sa marque de fabrique. Il passe par la case EC Comics en dessinant des petits récits de guerre, revient chez DC où on le voit sur des histoires de Batman, de Black Canary, chez Gold Key, Marvel et chez Warren où il va en effet produire plusieurs récits pour Eerie, Creepy et Blazing Combat.
En parallèle, dès 1960, il rejoint Cambria Productions qui lui permet de toucher pour la première fois au dessin animé avec la série SF Space Angels, ce qui va lui permettre, en 1964 de se faire embaucher par les studios Hanna-Barbera pour qui il va fournir de très nombreux designs de personnages, dont notamment Space Ghost, Birdman… et plus tard, avec les personnages DC comme la Justice League, les Super Friends, voire même un peu de licence Marvel avec les Fantastic Four.
D’un caractère pas toujours très facile, Toth se fâche progressivement un peu avec tout le monde, il produit de moins en moins, mais on le voit un peu chez DC, ou encore avec sa propre série : Bravo. Mais au fil des années, il se contente de travaux d’illustrations avant de s’éteindre sur sa table de travail le 27 mai 2006…

Eerie et Creepy présentent Alex Toth © Delirium
Eerie et Creepy
Avec cet album, l’éditeur Delirium revient donc sur une période très intéressante du parcours de l’artiste. En effet, Alex Toth se sert de ces divers récits pour expérimenter les limites de son propre dessin. S’il n’est alors plus vraiment besoin, pour lui, de prouver son savoir-faire, il n’en continue pas moins de se remettre en question, poussant davantage l’exigence et le besoin d’aller à l’essentiel. Ainsi, à travers ses histoires mêlant horreur et fantastique, il soigne ses cadrages, la construction de ses pages, il passe d’un trait extrêmement épuré, comme sur « La faucheuse », à des planches chargées d’ombres, comme « Grave undertaking » ou « Survival ! », jouant avec les silhouettes, les premiers plans, les décors, rajoutant à l’occasion du lavis, épaississant ses traits… Plus on progresse dans l’album plus on est ébloui par la maestria graphique qui s’en dégage, avec le sentiment de voir toute l’étendue de la palette de style que Toth déploie sous nos yeux.
Néanmoins, l’appréciation de ce volume ne se base pas uniquement sur la performance artistique. À travers ces récits, les scénaristes comme Archie Goodwin, Roger McKenzie, Doug Moench, Steve Skeates, Rich Margopoulos et Toth lui-même, continuent de perpétuer l’esprit des séries anthologiques des EC Comics, se servant très adroitement du format court pour synthétiser l’essence de ce genre qu’est l’horreur. Si l’on y retrouve tous les thèmes habituels, on peut en contrepartie apprécier l’habileté de certains scénarios comme, par exemple, « Out of Time », « Ensnared » (qui est aussi une très intéressante réflexion formelle sur la manière de construire une planche, de doser les textes, de jouer avec le strict minimum…), le sublime « Unreal », « Proof Positive », « La tuerie »…
Et c’est certainement grâce à cette alchimie entre fond et forme que cet album reste avant tout une remarquable expérience de lecture atemporelle qui permet non seulement de réhabiliter un des grands noms du comics US, mais surtout de nous faire passer un excellent moment de lecture.
De son côté, Urban prévoit de publier la traduction des épisodes de Zorro de Toth en octobre prochain, ça sera l’occasion d’accompagner cette lecture par une plongée dans une des grandes œuvres du maître.
Indispensable.
