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Champs de bataille - L'Histoire enfouie du remembrement

couverture de l'album Champs de bataille - L'Histoire enfouie du remembrement

Éditeur : Delcourt

Dessin : Inès LéraudAuteur :

Collection : La Revue Dessinée - Delcourt

Prix : 23.49€

  • ZOO
    note Zoo5.0

    Scénario

    5.0

    Dessin

    5.0
  • Lecteurs
    note lecteurs4.5
    2 notes pour 0 critique

Le synopsis de l'album Champs de bataille - L'Histoire enfouie du remembrement

À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, l'État fait redessiner les terres agricoles dans la plupart des campagnes françaises. Accessibilité des champs par des machines, regroupement des parcelles et disparition des haies et talus. C'est le "remembrement". L'objectif est que la paysannerie produise davantage, que le pays atteigne son auto-suffisance alimentaire et que la France devienne une puissance agricole mondiale.


La nouvelle BD coup de poing d’Inès Léraud et Pierre Van Hove

Après l’énorme travail d’investigation mené par la journaliste Inès Léraud dans Algues vertes, l’histoire interdite, elle s’est attaquée à celle, enfouie, du remembrement dans Champs de bataille. Ce brûlot, coédition Delcourt et la Revue dessinée, est aussi riche d’enseignements que révoltant. Encore une fois, depuis cette parution courageuse, on ne pourra plus dire qu’on ne savait pas.

Plus de 8 millions de kilomètres. Et encore, on semble bien loin du compte. C’est la longueur du nombre de talus, de bocages et autres composantes de la nature qui ont été remembrés, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et durant des décennies. « Regarde l’immensité, la lande a rendu, sa coiffe de dentelle / Comment peut-on s’émerveiller, à regarder une terre universelle / Des machines ont déraciné nos bocages, ont tari la source de nos chansons / A Kerouze, on a fait le grand nettoyage, ma province a soulevé son jupon » chantait déjà Claude Besson en 1973 face aux résultats du carnage.

Pendant près de quatre ans, la journaliste d’investigation Inès Léraud, qui avait déjà publié avec le dessinateur Pierre Van Hove la BD , formidable succès d’édition relativement inattendu, a enquêté en profondeur sur cette « histoire enfouie du remembrement », sous-titre de Champs de bataille.

Elle a arpenté les routes de Bretagne, de Haute-Vienne et d’ailleurs pour aller à la rencontre des habitants et récolter leurs témoignages. Courageusement, car il faut de la ressource pour enquêter sur des sujets qui fâchent (autant), elle est allée recueillir la parole de celles et ceux qui ont vu le paysage de leur enfance et la ferme familiale être réduits en de mornes plaines. Comme à Trébrivan, dans les Côtes-du-Nord d’alors (devenues les Côtes-d’Armor en 1990), où les bulldozers n’ont pu défigurer le paysage qu’avec l’aide d’une moisson de gendarmes mobiles tant la population était opposée au remembrement.

Champs de bataille L'Histoire enfouie du remembrement

Champs de bataille, L'Histoire enfouie du remembrement © Inès Léraud et Pierre Van Hove aux éditions Delcourt

On semble presque découvrir à quel point cette vaste entreprise de démembrement a eu des conséquences néfastes, voire mortelles, sur les paysans. Car on peut le dire aujourd’hui, comme le fait Léandre Mandard dans cette BD, dont il est le conseiller historique : dès lors que nos dirigeants ont voulu, contre vents et marées, soumettre l’agriculture d’après-guerre à l’industrie et aux marchés financiers, ils ont présenté le remembrement comme indispensable. Mais sous couvert de parcelles trop petites et de fermes trop modestes pour être viables, ils ont tué la vie paysanne de la France. Et engendré les pertes financières d’agriculteurs dépossédés de leur outil de travail et de leurs savoir-faire. La suite, on la connaît : un taux de suicides record, des gens qui ont arrêté de se parler dans les campagnes, parfois jusqu’à leur mort. Alors qu’il aurait peut-être fallu, comme le suggèrent plusieurs spécialistes, de consulter les paysans pour aboutir à des compromis. Mais l’Etat s’est posé en chantre du remembrement autoritaire, empêchant toute modification à l’amiable.

Plus encore peut-être qu’Algues Vertes car moins technique, Champs de bataille se dévore dans un court et passionnant tunnel de lecture. Le dessin, minimaliste, est le bon tempo graphique pour traiter en profondeur un sujet aussi concernant et lourd de sens :toute fioriture picturale risquerait de troubler le propos. S’il était encore besoin de le prouver, voici une nouvelle preuve de l’efficacité de la bande dessinée comme vecteur d’information, de rétablissement d’une réalité historique et diffusion d’un message politique.


La bande annonce sur l'album Champs de bataille - L'Histoire enfouie du remembrement

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