Nicolas Barral: Viva a liberdade!
Sans tambour ni trompette, Nicolas Barral nous emmène au Portugal à la découverte des derniers jours de la dictature de Salazar. En complément à l'article paru dans
19 janvier 2021
-Interview
Éditeur : Dargaud
Dessin : Nicolas BarralAuteur : Nicolas Barral
Genres : Historique, Roman Graphique
Public : À partir de 16 ans
Prix : 25.00€
Scénario
5.0Dessin
5.0Novembre 1935. Pessoa est mourant et n'a plus pour interlocuteurs que sa voisine infirmière, Maria de Almeida, et Miguel, son petit garçon bègue. Simão, jeune pigiste au Diario de Lisboa, est chargé de rédiger la nécrologie de ce poète dont il ignore tout, si ce n'est que son dernier ouvrage, Mensagem, a reçu le prix de propagande. Désoeuvré, il va prendre son travail très au sérieux, et remonter la piste en rencontrant les gens qui l'ont connu (éditeurs, collègues, famille...). Ces rencontres aideront le jeune journaliste à dessiner le portrait impressionniste d'un génie méconnu. A la manière de "Citizen Kane", "L'Intranquille Monsieur Pessoa" offre deux visions croisées et complémentaires de l'un des plus grands écrivains du XXe siècle, entre enquête journalistique et récit intimiste.
Après l’excellent Sur un air de fado, situé en 1968 dans les dernières années de la dictature de Salazar, Nicolas Barral continue d’explorer l’histoire du Portugal avec L’Intranquille Monsieur Pessoa.
Cette fois, bien que l’action de l’album se situe également dans un Portugal rongé par la dictature, le contexte politique est secondaire. Nicolas Barral remonte le temps jusqu’en 1935, soit trois ans après que Salazar soit devenu chef du gouvernement, pour se plonger dans le bouillonnement littéraire portugais de l’entre- deux-guerres. Et ce en focalisant son intrigue sur la vie d’un des plus célèbres hommes de lettres lusitaniens : Fernando Pessoa (1888-1935). Il est vrai que le personnage est assez fascinant. Employé modeste et très introverti, Pessoa participe activement à la vitalité du groupe Orpheu, fer de lance du modernisme littéraire au Portugal. Relativement peu publié de son vivant, il connaît une gloire posthume lorsque ses œuvres inédites, retrouvées chez lui dans une malle, sont éditées au long d’une cinquantaine d’années. Surtout, Pessoa utilise pour signer ses textes un nombre impressionnant de pseudonymes (plus de 70), qui sont autant de personnes fictives à qui il donne vie.
© Nicolas Barral / Dargaud 2024
À travers le personnage d’un jeune journaliste chargé de rédiger la nécrologie de l’écrivain, Nicolas Barral se délecte de conter la vie d’un auteur très surprenant, à l’article de la mort par la faute d’une cirrhose. La description tout en finesse de son monde intérieur, de ses traumatismes juvéniles, de son rapport à la littérature et à ses contemporains, provoque à celles et ceux qui ne les connaissent pas déjà, la furieuse envie de découvrir ses œuvres. À cette évocation se superpose une splendide immersion dans la ville de Lisbonne au cœur de l’entre-deux-guerres. Les rues, places, restaurants, intérieurs lisboètes ou la rédaction du Diário de Lisboa s’animent avec un réalisme et une sensibilité enthousiasmants. Un écrin pour une biographie inspirée. On sort rêveur de cet album, intrigué par la vie de l’auteur du Livre de l’intranquillité, écrivain aux mille vies imaginaires. Un comble pour un homme dont le nomde famille signifie « personne ».