Worm désigne le vers ou la vermine. C'était le surnom que Fidel Castro utilisait pour décrire les Cubains qui cherchaient à fuir après la révolution de 1959. Edel Rodriguez en a fait partie. Il raconte sa jeunesse sur l'île, dans les champs de canne à sucre ou à la périphérie des villes, où ses parents partent discuter pour échapper aux oreilles indiscrètes. En images saisissantes, il nous fait vivre la privation de liberté, nous montre la fuite depuis le port de Mariel en 1980 sur des bateaux de fortune. Et tisse le...
Worm - Une odyssée américano-cubaine
Edel Rodriguez, Sidonie Van Den Dries
Éditeur : Bayard
Auteur : Edel RodriguezTraducteur : Sidonie Van Den Dries
Genres : Roman Graphique
Prix : 28.00€
- ZOO4.0
Scénario
4.0Dessin
4.0 - Lecteurs0 critique
Le synopsis de l'album Worm - Une odyssée américano-cubaine
Retour vers le futur
Comment un enfant né sous le régime castriste, expatrié sur un bateau de fortune surpeuplé, a pu devenir un illustrateur internationalement reconnu, opposant à la démagogie trumpiste ? Parcours d’un artiste engagé, symbole de l’immigration contrainte et de l’intégration réussie.
Edel Rodriguez connaît bien les signes d’un régime dictatorial : il a passé une partie de son enfance à Cuba durant les années castristes. L’endoctrinement collectif et le culte de la personnalité, le dénigrement systématique de toute idée alternative à la doctrine, la peur des dénonciations qui s’insinue dans les foyers, forment ce quotidien donnant plus l’impression de survivre que de vivre. C’est cette ambiance pesante que nous fait vivre l’auteur à travers les yeux de l’enfant de 9 ans qu’il était, non sans naïveté, mêlant à la fois les anecdotes enfantines et l’histoire de ses parents déchirés entre un présent de plus en plus intenable et la crainte d’un saut dans l’inconnu par l’exil. Disons-le clairement, ce premier tiers n’est pas le plus passionnant du récit.
Worm © Bayard Graphic
Le ver est dans le fruit
Mais la partie véritablement épique du récit, celle qui remue les tripes du lecteur, incapable de rester impassible face à la détresse humaine, c’est le départ. Ou plutôt le non-départ. Ces journées d’avril 1980 où le régime cubain – sous une fausse mansuétude – permet à tous ceux qui en feraient la demande de quitter l’île pour les États-Unis. Cette opportunité, les parents d’Edel Rodriguez vont la saisir. Commence alors la description de l’infernal cycle mêlant violence, intimidation, faim et insalubrité. Pendant des jours et des jours, ces candidats à une vie meilleure vont payer cher leur « trahison » vis-à-vis du régime, rappelant avec justesse que l’immigration n’est pas un parcours facile à emprunter. Quand, près de 40 ans après son départ pour les États-Unis, l’ancien immigré, naturalisé et parfaitement intégré, voit une partie de son pays d’adoption tomber dans la séduction empoisonnée du trumpisme, les relents du passé lui reviennent en mémoire. La description méticuleuse du langage populiste, mettant en parallèle les méthodes de discours de Castro et Trump, est glaçante de justesse. Edel Rodriguez pousse un cri d’alarme, la tyrannie est à nos portes… de l’intérieur.