Le mathématicien A. Square est un carré résidant à Flatland, monde bidimensionnel. Après avoir décrit au lecteur son univers, Square visite Lineland (monde réduit à une seule ligne) et Pointland (avec un seul habitant, très égocentrique, un point !) avant de rencontrer un habitant de Spaceland : une sphère. Ses convictions en seront changées à jamais... Un pays à quatre dimensions existerait-il ?

Flatland

Éditeur : Delcourt
Auteur : DanicollateraleAuteur adapté : Edwin Abbott
Prix : 26.99€
- ZOO
4.0
Scénario
5.0
Dessin
4.0

- Lecteurs0 critique
Le synopsis de l'album Flatland
Axes X et Y, plus Z
Jugé jusque-là inadaptable, Flatland, le roman d’Edwin A. Abbott, débarque pourtant chez Delcourt, entre les mains de Danicollaterale, qui nous propose un album hors norme qui ne laissera personne indifférent. Un pari audacieux pour une œuvre atypique.
Initialement publié en 1884, Flatland a tout de suite marqué les esprits, non seulement par la nature géométrique de l’univers mis en scène, mais aussi par la profondeur critique du propos. On y rencontre un carré qui évolue dans un monde en deux dimensions, ne percevant ses congénères triangles et autres polygones que comme de simples segments. Jusqu’au jour où une sphère vient interagir avec ce plan, bouleversant le rapport à l’espace de cette population qui ne comprend pas de quoi il s’agit. Le carré, d’abord sceptique, parvient à appréhender l’existence d’une troisième dimension. Il essaye d’en convaincre les autres habitants de ce « plat pays », mais on le prend pour un fou et on l’emprisonne.

Extrait de "Flatland" Une fable géométrique entre satire sociale et vertige métaphysique © Delcourt
Lignes, segments et points
Danicollaterale se réapproprie donc le texte d’Abbott en nous donnant la possibilité de le visualiser. Si le roman, qui contenait quelques schémas explicatifs, nous amenait à aiguiser notre perception de l’espace, l’album apparaît déjà plus accessible, tout en jouant nettement moins sur l’imaginaire.
Nous découvrons alors une civilisation complexe composée de mille et une figures géométriques hiérarchisées selon leur forme, leur degré de complexité, voir même parfois leur couleur. À travers cette allégorie, l’auteur s’interroge sur la perception que l’on peut avoir des notions abstraites qui nous dépassent, de ce qu’on est prêt à accepter ou à refuser. Mais il pose aussi un regard sans concession sur cette civilisation obtuse qui prône la normalisation au détriment de la marginalisation. Le carré explique, à son lecteur « Spacien », sur plus de la moitié de l’album, le fonctionnement de cette société, son histoire, ses conflits et sa religion. Il faut passer cette étape très didactique pour enfin aborder la rencontre du carré et de la sphère qui va révolutionner tout ce que ces polygones pouvaient comprendre sur l’espace qui les entoure, notamment cette étrange notion de « hauteur ».
Si la démonstration est passionnante en littérature, car purement cérébrale, en bande dessinée, elle apparaît très vite plus froide. Cependant, Danicollaterale joue habilement avec les codes de la narration tels que les a extrapolés, par exemple avant lui, Martin Panchaud avec La couleur des choses. Il s’éloigne du figuratif pour proposer une mise en scène d’idées conceptuelles très adroites, mais reste peut-être encore très professoral dans sa conception, comme le roman, avant lui. Une vraie curiosité.
Article publié dans le mag ZOO n°106 Septembre-Octobre 2025
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