Champignac - T4 : Les années noires

BeKa et Étien proposent une variation étonnante autour de Champignac, en l’inscrivant dans un cadre réaliste où se croisent FBI, Einstein et fantômes du passé.

En 1943, le comte de Champignac travaille à l’université de Princeton. Son apparence se rapproche déjà de celle qu’on lui connaît dans Les Aventures de Spirou et Fantasio. Ses cheveux et sa moustache ont blanchi depuis qu’il porte le deuil de Blair, l’amour de sa vie. Sa peine est telle qu’il croit la voir à ses côtés plusieurs fois par jour. Il lui parle comme à une présence réelle, ce qui pousse son entourage à le considérer comme un homme un peu dérangé.

Fragilisé, Champignac accepte de collaborer avec Hoover, en pleine chasse aux communistes, pour déterminer si Einstein représente une menace pour les États-Unis. Au fil de leurs rencontres, il interroge le savant en exil et tente de percer sa véritable personnalité. Malgré quelques doutes, il choisit de ne pas le dénoncer. Parallèlement, Champignac constate que plusieurs étudiants et professeurs disparaissent soudainement de Princeton. Ses recherches à la bibliothèque révèlent un point commun troublant : tous avaient emprunté un guide touristique sur le Nouveau-Mexique. Lorsqu’il rapporte cette découverte au directeur du FBI, celui-ci le fait enlever au beau milieu de la nuit…

Le style d'Étien illustre parfaitement le scénario de BeKa, nous entraînant aux côtés de Champignac dans son enquête.
© Dupuis 2025

Le scénario signé BeKa s’avère solide et bien construit. Les deux auteurs, réunis sous un même pseudonyme, plongent Champignac dans un univers réaliste et sombre, au contact de grandes figures de la Seconde Guerre mondiale. L’intrigue est prenante, mais le choix du comte comme protagoniste surprend : son caractère grave et mélancolique ne correspond guère au savant fantasque et excentrique que connaissent les lecteurs de Spirou et Fantasio. L’histoire aurait peut-être mieux fonctionné avec un autre personnage.

Le dessin d’Étien, quant à lui, se distingue par sa maîtrise. Son style semi-réaliste rend parfaitement reconnaissables les nombreuses personnalités historiques mises en scène. Il ressuscite également le professeur Sprtschk, apparu pour la première fois sous la plume de Franquin dans Le Voyageur du Mésozoïque. Ses personnages, aux têtes légèrement disproportionnées, évoluent dans des décors d’un réalisme saisissant. Dessinateur caméléon, capable de passer de à ou à Champignac, Étien démontre encore une fois tout son talent.