Patrice Leconte, Jérôme Tonnerre et Alexandre Coutelis proposent avec Deux passantes dans la nuit une traversée du Paris nocturne sous l’Occupation. Aux abois, deux Mimi Pinson cherchent un refuge.
Arlette et Anna n’ont pas grand-chose en commun. La première sort de prison, condamnée pour recel d’objets volés (par son fiancé). La seconde, prestidigitatrice polonaise de confession juive, fait profil bas pour ne pas être remarquée par la police. Au cœur d’un Paris occupé par les nazis, sortir sans être affublé de son étoile jaune peut en effet coûter cher. Les deux jeunes femmes ayant aussi peu de perspectives l’une que l’autre, elles vont unir leurs pas dans la capitale endormie pour trouver une bonne âme susceptible de les aider.
De multiples influences
L’empreinte de Patrick Modiano, prix Nobel de Littérature en 2014 dont l’œuvre se situe principalement dans le Paris de l’Occupation, est clairement présente en creux (une citation de son discours de réception de la récompense suédoise est d’ailleurs placée en exergue de l’album). Mais pas seulement. On pense aussi à La Traversée de Paris, film de 1956 de Claude Autant-Lara d’après une nouvelle de Marcel Aymé, immortalisé par Gabin, Bourvil et de Funès. Ce mélange de genres entre la gravité et l’humour est caractéristique du travail de Patrice Leconte (auteur de bande dessinée pour Pilote dans les années 1970 parallèlement à sa formation de cinéaste), coscénariste de l’album avec Jérôme Tonnerre.
Ce premier tome, dont l’atmosphère étouffante est parfaitement rendue par le dessin d’Al Coutelis, expose les éléments de l’intrigue dans une ville tétanisée par l’occupant et ses séides français. La délurée Arlette et la mystérieuse Anna se dévoilent au compte-goutte, au fil de leurs rencontres nocturnes, parfois dangereuses, souvent décevantes. On attend avec appétit la suite de l’histoire pour voir comment l’intrigue va se développer et quels nouveaux oiseaux de nuit vont faire leur apparition.
Article paru dans le Mag ZOO N°76 Mars-Avril 2020