Pour le sultan d’Eschnapur, il n’y a que deux attitudes possibles : se plier au diktat de la couronne anglaise afin de conserver son rang privilégié ou, à l’instar de son futur beau-père, prendre les armes. Dans cet imbroglio familial finement mené où chacun cherche à tirer le meilleur parti de la situation, tout semble se jouer dans le pavillon des plaisirs où sexe et pouvoir sont intimement liés.
Il est bien entendu indispensable d’avoir, au moins, lu les deux tomes précédents du cycle India pour pouvoir suivre l’intrigue imaginée par Jean Dufaux. Ses personnages fictifs s’intègrent parfaitement bien dans la grande Histoire où l’on voit comment l’empire colonial britannique commence à se fissurer sous la pression des Indiens lassés par toutes les exactions commises sur leur sol.
De l’intérieur du sérail où Jade, la Djinn, est chargée d’initier la promise du sultan à son futur rôle d’épouse aux scènes de batailles opposant les indigènes aux soldats de Sa Majesté, de la volupté des rapports amoureux à la cruauté des affrontements, Ana Mirallès promène son crayon tout au long de ses pages avec une aisance indéfectible.
Elle nous offre une vision de l’Inde du début du XXème siècle avec un luxe de détails quant aux décors et aux costumes, digne d’une superproduction hollywoodienne (ou bollywoodienne !). Son découpage et ses cadrages sont quasi-cinématographiques. Une mention spéciale aussi pour son travail de coloriste, où, selon les ambiances, les tons pastel alternent ou cohabitent harmonieusement avec des tonalités plus flashy.
Cet album devait initialement clore le troisième cycle. Mais, une fois encore, l’imagination foisonnante de Jean Dufaux boostée par la prestation graphique éblouissante de sa partenaire, débordera sur un quatrième tome. Et, de plus, il est déjà question d’un nouveau cycle, un préquel, qui nous contera comment Jade est devenue une Djinn. Somme toute de quoi nous tenir en haleine encore un bon moment !