Veuf, renié par ses enfants, poursuivi par la justice et le fisc, Joanovici le ferrailleur milliardaire va tenter une dernière fois de reconstruire sa fortune et de s’acheter une respectabilité. Peine perdue : nul homme n’est assez riche pour racheter son passé.
Récompensée à Angoulême en2011 par le Fauve de la meilleure série, succès à la fois public et critique, Il était une fois en France s’achève sur un sixième tome aussi palpitant que les précédents. C’est l’heure du procès pour Joseph Joanovici. Les soupçons de collusion avec l’ennemi qui pèsent sur lui sont difficiles à dissiper. Il a indéniablement fait fortune pendant l’Occupation en vendant des métaux aux Allemands. D’un autre côté, il a utilisé une partie de son argent pour faire libérer des Juifs. Et il a financé un réseau de résistance. L’avocat de Monsieur Joseph est donc tout à fait confiant. C’est compter sans l’opiniâtreté du juge Legentil, déterminé à faire payer Joanovici pour ses crimes. Quant à ce dernier, même banni de Paris, sa capacité de rebond est intacte. Et si ce n’est pas de Province, le salut viendra-t-il de la Terre promise ?
Il était une dernière fois en France..
Fabien Nury a découvert Joseph Joanovici en s’intéressant à l’histoire du crime organisé en France. La documentation sur Joanovici, abondante et contradictoire, révèle un personnage ambigu et contrasté. Nury décide, et c’est là un des intérêts de la série, de ne pas choisir entre les éléments à charge et à décharge, mais d’adhérer aux deux points de vue : "Je crois, et il y a de nombreux témoignages à cet appui, qu’il a sauvé environ 150 personnes des camps de la mort. Ce qui n’est pas rien. Je crois aussi qu’il a fait tuer des gens, et qu’il a participé directement à un meurtre. Ce qui n’est pas rien non plus."
Au dessin, Sylvain Vallée emploie un style réaliste, légèrement caricatural "Je cherche à parler à la conscience collective des gens, qui est liée au cinéma de ces années-là, avec des films comme La Traversée de Paris, L’Armée des ombres ou Paris brûle-t-il ?Je cherche un traitement proche du réel. Ce qui me pousse à éviter les onomatopées, les compositions très BD, les inserts, les superpositions de cases⁄ Je privilégie la simplicité, je pose juste un cadre sur le réel. Comme au cinéma." Le cinéma, il en est question, car une adaptation de la saga en long-métrage pourrait avoir lieu. Mais ce n’est pas une fin en soi. Sous sa forme livresque, avec toute la sincérité, le talent et la complémentarité de deux très grand sauteurs, Il était une fois en France est une oeuvre marquante de la décennie écoulée. Avec le parfum des grands classiques du panthéon de la bande-dessinée.
Article publié dans le ZOO n°42 - Décembre 2012
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