Serge Le Tendre et Gaël Séjourné livrent le premier volet d’un diptyque abordant les thèmes du double, de la monstruosité et de la vengeance. L’aventure est sombre et particulièrement convaincante.
1941, New York. Harvey travaille sur un projet de comédie musicale pour Broadway avec son ami Ross. Pour une fois, la situation se présente plutôt bien. Mais les Japonais bombardent Pearl Harbor et les États-Unis entrent en guerre.
1944, Italie. Harvey est copilote dans un avion touché par des tirs. S’il survit à un atterrissage forcé, il est en partie défiguré. Sa vie s’en trouve profondément bouleversée, pour le meilleur et pour le pire...
L’ART DES AMBIANCES
Le scénario de Serge Le Tendre est riche, machiavélique et extrêmement bien ficelé. Il aborde les thèmes de l’existence sacrifiée, du double et de la vengeance. Il développe une réflexion sur la monstruosité et ses dimensions physiques et morales. Gaël Séjourné a la bonne idée d’enrichir son dessin réaliste, toujours vif, de quelques traits de caricature qui apportent une touche ironique et accentuent l’aspect terrifiant du récit. Par ses thèmes et son traitement de l’horreur, La Peau de l’autre évoque le sublime et glaçant film de Georges Franju, Les Yeux sans visage (1960), mais également les adaptations cinématographiques du Fantôme de l’Opéra (1910) de Gaston Leroux et notamment Phantom of the Paradise (1974) de Brian De Palma. Plus largement, cet album est un très bel hommage aux films d’épouvante des années 30 à 50. Comme ces derniers, l’une de ses qualités est de soigner les situations et les ambiances. Celles-ci permettent d’entrer dans chaque partie de l’histoire, d’esquisser rapidement les principaux traits de caractère des personnages et contribuent pleinement à la crédibilité du récit.
Ce premier tome, fort enthousiasmant, se termine par une scène qui suggère une suite encore plus sombre, c’est dire...
Article publié dans le Mag ZOO N°81 Mai-Juin 2021