Un homme qui recherche un enfant juif caché quelques années plus tôt dans un village du Sud, cela donne un récit champêtre en apparence, mais faisant remonter à la surface des secrets enfouis.
Samuel ponctue son arrivée dans un pittoresque petit village du Lot en faisant un malaise. Il est à la recherche d'un enfant juif qui a été caché là pendant la Seconde Guerre mondiale. Six ans après la fin du conflit, de nombreux enfants cachés un peu partout en France n’ont pas encore été retrouvés. Ceux qui sont à leur recherche sont appelés des dépisteurs. Antoine Ozanam s’intéresse le temps d’un diptyque à l’un d’eux.
Et l’on peut dire qu’il sème les indices pour intriguer le lecteur. Quelle est la cause des malaises dont souffre Samuel ? Pourquoi est-il traumatisé par la recherche qu’il a effectuée d’un enfant au Pays basque, dont nous voyons plusieurs séquences en flash-back ? Pourquoi a-t-il peur des uniformes ? Quel est donc ce groupe de « poètes » qui séjourne également dans le village ? Quel est le secret de La Tondue, cette femme qui vit en marge avec l’enfant qu’elle a eue d’un soldat allemand ? Le scénariste multiplie les (fausses ?) pistes. Peut-être un peu trop. On se perd parfois, même si ce n’est pas désagréable. Car ce qui fait la spécificité et le sel de cette histoire, c’est l’ambiance rurale du début des années 50. Malgré les lourds secrets et les faux-semblants, un sentiment d’authenticité émane de cette vie au rythme tranquille. Étonnant paradoxe.

Le Dépisteur T.1
©Glénat 2023
Un point fort de ce tome 1 est le dessin soigné et précis de Marco Venanzi, digne héritier de Jacques Martin (Venanzi a dessiné trois épisodes d'Alix dont le très bon Le Testament de César dont il est aussi scénariste), mais avec un traitement plus libre que feu son maître. Il a également succédé à André Juillard sur Masquerouge. Deux références qui permettent de situer sa famille graphique. Dans Le Dépisteur, il traduit bien les paysages du Sud dans la chaleur de l’été. La mise en couleur qu’il effectue lui-même y contribue avec justesse.
Gageons que ce 1er tome prendra tout son sens dans le suivant, et que nous ne serons pas déçus.