Un récit à lire ne serait-ce que pour son graphisme somptueux, mais un scénario sur la manipulation génétique également intéressant, malgré quelques travers. Le tout place l'album parmi les meilleurs de la collection.
Parlons tout d'abord du dessin qui est un vrai choc visuel grâce à la virtuosité de Ma Yi, dont chaque case est un véritable petit tableau, une merveille de composition, de style et de couleurs. Ici, pas de scènes sans décor sous le prétexte d'aérer les pages ou d'apporter de la lisibilité. À chaque fois, l'artiste offre généreusement un splendide travail sur les décors et le résultat est d’une grande lisibilité.
Quant au récit adapté par Sylvain Runberg, il est tout en paradoxes. Réaliste quand il parle de l'Afrique, poétique par le final proposé, mais avec un angle mort qui arrange : ici, pas de personnages chinois contrairement aux précédents albums de la collection. L'Occident personnifié par les États-Uni est pointé du doigt pour son impérialisme économique qui pille l'Afrique. En revanche, aucune mention concernant la présence de plus en plus importante des intérêts chinois sur le continent, avec une exploitation outrancière des ressources comme des hommes.
© Delcourt, 2023
Le dessinateur chinois Ma Yi traduit bien cette ambivalence dans ses portraits caricaturaux des militaires américains avec leurs mentons en parpaing à la Steve Warson, alors que ses portraits de Xambiens, peuple symbolisant l'Afrique exploitée, sont saisissants de subtilité. Comme si l'artiste voulait avertir le lecteur de décoder le propos que lui-même ne peut exprimer librement du fait de la dictature chinoise. Ou alors il voit vraiment les Américains ainsi.
L'intérêt de la nouvelle de Liu Cixin vient de la réflexion sur la génétique qui peut être condamnable quand elle vise à modifier les gènes humains. Mais avec un bémol : si le but est de sauver la vie d'un peuple, la manipulation génétique ne devient-elle alors pas acceptable ? La réponse n'est pas si simple !
Au final, un récit multi-facettes intéressant à lire d'autant plus si on se donne la peine de le décoder. Et porté par un dessinateur au talent éblouissant.
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