Nouvel opus sur la guerre de Sécession avec Chesterfield, Blutch, un cartographe, des Indiens et même le retour de Miss Appeltown. La comédie se fait plus dramatique avec Kris, et Lambil continue sabre au clair à galoper via ses planches.
Second scénario des Tuniques bleues pour Kris. Chaque nouvel album est un évènement, pas seulement parce que la série continue à bien se vendre au 67e tome, mais aussi parce que Willy Lambil est toujours actif à un âge plus que respectable : 87 ans. Si son dessin n'a plus la précision des belles années, il fait en sorte de compenser par son expérience : les scènes restent bien composées, le jeu des acteurs tient encore la route. Et l'artiste investit davantage les scènes de nature qu'il apprécie particulièrement. On peut d'ailleurs supposer que dans le cahier des charges donné à son scénariste pour cet épisode figurait la forêt, théâtre d'une bonne partie de l'intrigue. On a aussi le plaisir de revoir Miss Appeltown et son père, ainsi que Tripp et Brian, compagnons des premières aventures il y a une cinquantaine d’années (déjà).
Les Tuniques Bleues Tome 67
© Kris, Lambil - Dupuis
Côté scénario, Kris introduit Jérémiah Clure, un géographe dont le physique fait penser à Marcel Gotlib. Le personnage est un anarchiste, terme revendiqué par le quidam mais que personne ne connaît en 1861. Il faut dire que l’anarchisme ne naîtra vraiment qu’une dizaine d’années plus tard, en Suisse. La présence de Clure, à la conscience sociale aiguisée, permet des interactions contrastées avec Chesterfield (qui doit se reposer pour cause de stress post-traumatique), Blutch et les Indiens. Les Indiens sont d’ailleurs un des sujets clés de l'album : leur engagement pour le Nord ou le Sud engendre des représailles sanglantes du camp adverse, conséquence que l’on ignore généralement.
Les Tuniques Bleues Tome 67
© Kris, Lambil - Dupuis
Si Raoul Cauvin exprimait clairement ses convictions antimilitaristes dans cette série, il ne l'amenait pas sur le plan politique. Le pas serait-il franchi ? Comme dans le tome précédent, l'humour reste présent, avec quelques bonnes répliques, mais le ton se fait plus grave. Une inflexion dans la série, peut-être. Rendez-vous dans un an pour le vérifier, monsieur Lambil ?