Après Cosey, Trondheim et Tébo, Loisel réécrit Mickey Mouse. Son Café Zombo offre une relecture intelligente de l’univers de la célèbre souris. Entre considérations sociétales et politiques, Mickey s’engage sous la plume magnifique d’un auteur présent au scénario comme au dessin.
Un format à l’italienne, une couverture délicieusement vintage, une page de garde, superbe, presque croquée, une histoire complète découpée en strips, l’ambiance est posée. Au cœur de la Grande Dépression de 1930, Mickey et Horace font la queue à l’embauche. Victimes de discrimination, ils partent en vacances avec leurs compagnes et Donald. À leur retour, ils sont bien surpris de retrouver une ville où l’expropriation fait rage. Pire que ça, les habitants, sous l’emprise du malfaisant Rock Füller et d’une étrange drogue, le café « zombo », sont tous comme zombifiés.
Le croisement entre l’univers naïf de Mickey et des thématiques réalistes et complexes s’avère très réussi. Ainsi, chômage, corruption, discrimination à l’embauche, expropriation, lutte des classes, robotisation (la zombification), voire addiction et malbouffe sont traités par Loisel. L’auteur n’oublie pas pour autant humour, optimisme et aventure : Mickey, symbole de résistance, ne baisse jamais ses petits bras.
Les textes percutants et le découpage enlevé donnent un rythme dynamique. Les personnages sont vifs et leurs mouvements véloces. L’encrage de Loisel est particulièrement approprié à un design de Mickey proche de ce qui se faisait dans les années 30, sous Floyd Gottfredson. Les décors très fouillés parsemés de nombreux détails enrichissent la ligne directrice. L’ensemble est aussi embelli par des jeux de regards percutants, du premier à l’arrière-plan.
Café Zombo, album pertinent et de qualité, démontre que Loisel parvient à donner du sens aux aventures de Mickey sans le trahir. L’espoir et l’optimisme dont fait preuve la souris résonnent encore plus fort dans le contexte réaliste et sombre de ce récit.