À Rome, les flammes se sont éteintes mais les cendres couvent encore. Les trahisons, les peurs et les ambitions s’entrecroisent. C’est dans ce climat oppressant, où chaque décision peut sceller un destin, que débute ce nouveau cycle de Murena.
Le premier album de ce quatrième et dernier cycle de Murena se situe après la conjuration de Pison ainsi qu’après le grand incendie qui a dévasté Rome. À la suite de ces événements, la popularité de l’empereur Néron est en chute libre. Pour redorer son image, son conseiller Tigellin lui propose d’organiser de grands jeux : les Neronia, dont le peuple est friand. Pendant ce temps, Lucius Murena est toujours traqué. Accusé d’être l’instigateur de l’incendie, il vit désormais dans l’ombre. Il parvient toutefois à faire évader Lemuria, la femme qui l’a drogué mais aussi protégé durant un temps. Malgré la tentative de domination qu’elle a exercée sur lui, elle lui a également sauvé la vie. Le lien qui les unit reste ambigu. Dans cette entreprise, Murena est épaulé par l’Hydre, ancienne gladiatrice, liée elle aussi à l’empereur par une relation étrange.
Quel plaisir de retrouver cette saga créée par Jean Dufaux et dessinée à l’origine par Philippe Delaby. Ce dernier a illustré les neuf premiers tomes avant son décès, puis Théo a repris le flambeau pour les trois albums suivants. Aujourd’hui âgé de 76 ans, Dufaux souhaite mener à son terme ce dernier cycle. Théo, bien que brillant, avançait à un rythme lent — trois à quatre ans entre chaque album. Pour accélérer la suite, le scénariste a fait appel à Jérémy, ancien assistant et coloriste de la série. Celui-ci, alors qu’il avait commencé à travailler sur Murena dès l’âge de 17 ans, revient ainsi au dessin : la boucle est bouclée. Son style réaliste, solide et expressif s’inscrit pleinement dans la continuité de ses prédécesseurs. Ses planches en noir et blanc sont superbes et la puissance du dessin s’estompe un peu avec les couleurs.

Planche extraite de Murena T.13 - Les Neronia, en librairie depuis le 7 novembre. Illustrations par Jérémy.
© Dargaud 2025
Le scénario de Dufaux reste fidèle à l’esprit des cycles précédents. Le lecteur se demande sans cesse comment Murena pourra s’en sortir. Il est proche de l’empereur dont le destin tragique est connu : il se suicidera. Les différents protagonistes avancent chacun avec leurs motivations, et même si certains personnages sont fictifs, la majorité d’entre eux appartiennent à l’histoire réelle. Le résultat est un péplum captivant, crédible, porté par des figures complexes. On a parfois l’impression d’assister à une tragédie shakespearienne.
Le prochain tome est déjà à moitié dessiné, et le lectorat attend sa parution avec impatience.