Une aventure sans temps morts magistralement illustrée par Surzhenko, digne héritier de Rosinski. Un récit qui fait le job mais parfois trop manichéen, avec une Kriss toujours plus cruelle tandis que Thorgal louvoie entre états d’âme et action.
Surzhenko est un familier de l’univers de Thorgal, pour avoir dessiné des albums des séries dérivées Louve (7 tomes) et La jeunesse de Thorgal (11 tomes), tous avec Yann au scénario. Le dessinateur a également illustré le tome 6 de Kriss de Valnor. Bref, il était armé pour faire avec son vieux compère ce one-shot (en fait le tome 3 de Thorgal Saga) qui se glisse entre les tomes 21 et 22 de la série mère (vous suivez toujours ?).
Et Surzhenko réussit à nous étonner en transcendant son art. Il a vraiment tout compris de l’univers de Rosinski (avant sa période couleurs directes). Découpage, attitudes des personnages, encrage à la fois relâché et précis, décors, travail sur les textures… et les couleurs, qu’il réalise lui-même, dans l’esprit de celles de Graza, épouse de Rosinski.
Nous sommes à la période où Thorgal est dans sa période dark : amnésique, il est manipulé par Kriss qui lui fait croire qu’il s’appelle Shaïgan-sans-merci, cruel chef d’une bande de pillards. La soif de pouvoir et de fortune de la belle Kriss semble sans limite. C’est un peu le regret à la lecture de cette histoire, le côté « no limit ». Kriss surenchérit sans cesse dans la violence : hommes, femmes, enfants, tout le monde trépasse à son contact. Elle surjoue son propre rôle, dans cette aventure de 78 pages pour laquelle Yann n’a pas ménagé pas sa peine.
Thorgal Saga, tome 3 : Shaïgan © Surzhenko/Yann — Éditions Le Lombard
Thorgal, même s’il est amnésique, a des angoisses existentielles et un vieux sorcier l’envoie à la recherche d’une épée mythique, celle du roi Halvdan-le-noir, qui a été inhumé avec. Accompagné de Kriss et de leur bande, il doit déjouer bien des pièges. Yann n’a pas oublié d’ajouter une pincée de fantastique et de mythologie nordique. Tous les ingrédients sont donc réunis et si le résultat est honorable, il semble manquer quelque chose. Mais quoi ? Le tour de main de Van Hamme, peut-être.
L’occasion de relire La couronne d’Ogotaïet Géants, les deux albums qui encadrent ce Shaïgan qui fera bonne figure dans la section Vikings de votre bibliothèque, malgré ces quelques réserves.