À la fois métaphorique et historique, fantastique et réaliste, Strange Fruit est une œuvre percutante dans laquelle un colosse noir illustre la souffrance de toute une ethnie. Un ouvrage fort et émouvant.
Fin des années 20 dans le Mississippi. Le célèbre fleuve fait des siennes et la grande crue s’annonce catastrophique pour les habitants. Ouvriers et ingénieurs se creusent la tête pour trouver une solution. Le tout dans un contexte de racisme exacerbé et un contrôle des institutions de la ville par ces braves salopards du KKK.
Les Noirs sont réquisitionnés contre leur gré pour renforcer la digue et les tensions entre les communautés sont à leur paroxysme. Et puis, un homme noir gigantesque déboule sur Terre à travers un éclair, tel Terminator dans le premier opus. Ce colosse va cristalliser la haine des membres du KKK mais va quand même accepter de participer au chantier de la digue.
Jones et Waid ont fait de ce colosse la représentation de la souffrance noire et de tous ces hommes morts pour bâtir l’Amérique. Ce n’est qu’une des nombreuses métaphores et références disséminées à travers l’ouvrage. Par exemple le colosse, qui apparaît nu au début de l’histoire, utilise pour cacher ses attributs un drapeau confédéré. Un joli pied de nez à un symbole raciste encore arboré aujourd’hui par certains Américains nostalgiques de l’esclavage.
Le dessin, très réaliste, est paré de couleurs douces qui semblent apposées au pinceau. Le graphisme très lumineux contraste avec le ton dur du récit. Les arrière-plans très riches plongent le lecteur dans les paysages américain grandioses du Mississippi et, malgré tout, l’ambiance faste des années 20.
Strange Fruit illustre avec brio une tranche sombre d’histoire de l’Amérique. Un ouvrage fantastique qui révèle l’histoire tourmentée des relations inter-éthniques aux Etats-Unis.
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